mercredi 27 janvier 2010

Les vieux salopards à l'assaut du Mékong


S
amedi dernier au Laos, nous étions une joyeuse bande de vieux salopards remontant le Mékong à pleine vitesse sur des barques étroites à fond plat (jet boats) équipées de moteurs pétaradants. Appelées bateaux à longue queue, ces fragiles embarcations de quatre à six passagers foncent à près de 70 km/h en émettant un boucan qui résonne contre les rives escarpées et boisées. Salopards bardés de casques et gilets de sauvetage, grisés par l'aventure puisque nos jeunes pilotes laos devaient éviter les remous trop violents, les rochers immergés
et les bois flottants. (Les accidents mortels ne sont pas rares -- ce que les touristes préfèrent ignorer.)

Proverbes laos. Un seul poisson peut empoisonner toute la corbeille; le
son d'un seul gong se fait entendre dans tout le village... Un homme intelligent n'a pas forcément plus raison qu'une bande de fous...

Durant la nuit précédente, logé au bord de l'eau, j'avais entendu le tintem
ent des clochettes en bois que portaient les éléphants domestiqués qui "pâturaient" librement dans la forêt, de l'autre côté du fleuve. Le son était ténu, comme celui d'un troupeau de vaches dans un lointain alpage. Il s'accompagnait de craquements sourds, ceux des branches et des jeunes troncs que les pachydermes cueillaient en enroulant leur trompe.

Après deux heures de vitesse, nous avons embarqué sur un bateau lent (héua sáa), parti la veille avec nos bagages et sur lequel nous devions gagner le Triangle d'Or, lieu de rencontre du Laos, rive gauche, du Myanmar (Birmanie) et de la Thaïlande sur la rive droite. Péniche confortable, habitée par une famille où la mère et la fille préparent et servent les repas, le père et le beau-fils s'occupent de la navigation. Nous avions le temps d'observer, de loin en loin, un village de huttes rectangulaires sur pilotis, quelques orpailleurs secouant un peu d'espoir dans un tamis et les rares pêcheurs qui trouvent encore leur subsistance dans le fleuve. Il y a longtemps qu'on ne capture plus de silures géants (poissons-chats) dans le Mékong, ces créatures qui pouvaient atteindre jusqu'à trois mètres de longueur et peser 300 kg.

Ulysse

2 commentaires:

Jérôme a dit…

C'est une erreur répandue, cher Ulysse, d'annoncer que le silure équivaut au poisson-chat. Ils font partie d'espèces différentes. En France, notamment dans le delta du Rhône, on pêche des spécimens qui dépassent parfois 2m de longueur pour 1m de tour de taille et une centaine de kg. Le silurus glanis est aussi en expansion dans le Danube (jusqu'à 300 kg) et le Pô. quel malheur que le Mékong soit pareillement dépeuplé!

Vera a dit…

Rien qu'à contempler le bateau vert qui transporte paisiblement ses passagers, j'ai envie de partir en vacances au Laos. Mais calmos! Pas en violant la nature à toute vitesse. Vous n'avez pas honte?