dimanche 29 avril 2012

Pornographie militaire américaine : les photos, les nus, les morts



Les Nus et les morts, roman que Norman Mailer a publié en 1948, reflète ses expériences de combattant dans le Pacifique. Il m'a terriblement impressionné lorsque je l'ai lu, dix ans plus tard. Il décrit une hiérarchie militaire dénaturée, des brutes envers les sans-grade, incompétents et en rivalité les uns contre les autres, même au péril de l'efficacité. Quant aux soldats qui souffrent des mauvais traitements et de blessures mal soignées, ils trouvent peu de consolation à se remémorer leur vie conflictuelle avec leur petite copine ou épouse.

J'ai conservé ce livre de poche qui porte en couverture Over 2 million copies sold (plus de 2 millions d'exemplaires vendus). Et constate que la vie des soldats ressemble toujours à celle d'un troupeau d'adolescents lancés dans un casse-pipe qui les dépasse, fondé sur le mensonge et l'imprévoyance.

Sur son épaule: la main d'un "terroriste" qui a explosé.
John Rico, un vétéran d'Afghanistan, commente le dernier "scandale" dans le journal en ligne Salon. Il s'agit de photos où des soldats posent avec des fragments de cadavres. Cela fait partie des trophées de guerre, explique-t-il, tous les gars planquent des images de pornographie militaire. Néanmoins, le public américain croit encore à une intervention aseptisée. Et lorsque de tels documents sont divulgués, les politiciens poussent de hauts cris, les huiles militaires promettent des punitions. Quelle farce! commente John Rico. "Avec un simple courriel auquel j'aurais attaché quelques photos de mon butin personnel, je pourrais relancer le débat et la controverse. Parce que je détiens aussi une collection d'images militaires pornographiques." Et d'expliquer certaines scènes qu'il a immortalisées. Ou d'autres, douloureuses, après la perte d'un camarade. Ou pacifiques: le portrait d'un petit garçon afghan souriant.

Ses tatouages: tuer et prier.


Des gamins perdus.
"N'oubliez pas que notre infanterie est composée d'une majorité de gamins de 18 ans qui se sont entraînés durant deux ans dans le seul but de combattre et tuer l'ennemi. Puis ils sont envoyés dans un pays étranger, un an sans perm à la maison, où ils sont constamment exposés aux dangers, où certains parmi leurs camarades vont mourir. Alors, lorsqu'on lui donne l'ordre de rassembler les parties du corps d'un homme qui vient de commettre un attentat-suicide, comment un être sensé réagit-il? Ce qui est grotesque [...] c'est d'imaginer qu'un type de 18 ans qui a reçu l'ordre de tuer ne jouera jamais avec des corps explosés. [...] La malencontreuse réalité [les Américains veulent l'ignorer] c'est que la guerre est sale. Les missiles manquent leur but la plupart du temps. Les drones tuent accidentellement des femmes et des enfants. Et lorsque les soldats d'infanterie qui ont 18 ans atteignent avec certitude leur première cible humaine, ils se tapent sur l'épaule, hurlent de joie et prennent une photo."

John Rico a publié ses souvenirs de carnage et de courage en Afghanistan intitulés Blood Makes the Grass Grow Green (Le sang fait pousser l'herbe plus verte) où l'on comprend que les soldats craignent encore plus les dangers cachés que présentent les populations civiles que les Talibans eux-mêmes.

André

vendredi 27 avril 2012

Ces biteniks et têtes de noeud qui ne pensent qu'à ça (quoi ça ?)











Mention spéciale Tête de noeud présidentielle à ces types qui tortillent du cul, l'un devant la droite extrême de son pays, et l'autre devant les Républicains les plus ignobles de toute l'histoire des États-Unis.


J'ai honte pour eux !



(Source de la plupart des photos: http://jaimelelol.tumblr.com/)

mercredi 25 avril 2012

Père, fils et petit-fils : trois générations de mecs solides


La conversation se déroule dans le vestiaire, après le cours de yoga. C'est un homme à l'ossature lourde -- je le sais puisque nous avons fait un exercice à deux où l'on soutient le dos du partenaire pendant qu'il s'élève dans un arc à l'envers. Je lui demande ce qu'il va faire ce week-end. "Samedi nous irons skier, ma femme et moi; les enfants seront chez mes beaux-parents. Nous passerons dimanche entre hommes, mon fils et moi; les femmes seront occupées ailleurs." Le fils, six ans, est féru de construction. Il étalera un jeu au pied du bureau de papa. Ensemble, ils détermineront un projet et l'enfant s'y attellera pendant que le père triera ses facture. Le garçon sait qu'il peut déranger papa; mais pas trop souvent pour que l'aîné puisse terminer son travail le plus tôt possible. Le reste de la journée leur appartiendra.

Arc à l'envers.
Notre conversation prend un tour intéressant. Il était lui aussi un garçon actif et entreprenant, toujours en train de bricoler et de tester ses inventions explosives. Ce qui créait pas mal d'incidents, aussi avec les voisins ou les passants dans la rue qui voyaient atterrir d'étranges projectiles à leurs pieds.

Yoga à poil: hélas pas dans notre salle.
"Cela n'a jamais eu de répercussions trop graves et ma mère savait négocier avec les plaignants. Au lieu de me gronder, mon père engageait une discussion d'homme à homme; 'regarde-moi bien au fond des yeux' disait-il. Il me demandait ce que j'avais retiré de l'expérience -- d'abord les aspects positifs pour me mettre en confiance, puis les autres. Qu'est-ce qui m'avait incité à inventer ce bidule, qu'est-ce que j'avais réussi, qu'est-ce qui n'avait pas marché. Nous discutions des erreurs, tant du point de vue technique que de la sécurité. Comment  j'avais dépassé les limites en ne tenant pas compte de ma sécurité ni de celle des autres personnes."





Le garçon n'appréciait pas toujours cet examen minutieux de chaque aspect du problème. Aujourd'hui, il se rend compte qu'il avait un père remarquable, rarement en colère, à l'écoute de son fils. Que cette attitude l'a aidé à progresser et qu'il a rarement répété la même bêtise. Mais avant tout, ces deux hommes ont appris à se connaître, s'apprécier, se comprendre. "Sans savoir, à l'époque, combien j'étais privilégié d'appartenir à une telle famille!"

Habillés, chaussés, nous nous quittons sur la rue et je suis heureux pour son fils. Trois générations de mecs dotés d'une solide force intérieure, donc en paix avec eux-mêmes et leur entourage.

André

samedi 21 avril 2012

Adam l'indécis qui a besoin des hommes et aime tant les femmes



C'est un chemin de vie moins exceptionnel qu'il ne le croit. Toutefois Adam (appelons-le ainsi), la trentaine, partage ce handicap avec beaucoup d'hommes: 1) il n'arrive pas à définir son problème, par crainte de le dépister dans toute son ampleur, et 2) il craint (a honte) de se confier à un autre homme. Mais les événements ont pris les devants: rupture d'avec son épouse qu'il aimait de coeur et de corps. L'attrait qu'il ressent envers les mecs n'était pas inscrit dans les clauses de leur mariage. Et elle n'était pas prête à envisager un partage.

Modèles: Brandon Connelly (Adam) et Shaun Tia (Ève). Photographes: Charlie Nobel (chutes d'eau) et quelques autres.


Libre et en pleine confusion, Adam a ouvert la boîte de Pandore. (Πανδώρα, la déesse grecque, fait émerger des cadeaux qui nous viennent des profondeurs et nous rendent plus féconds ou créatifs.) Il a donné libre cours à son attirance et s'est immergé dans le monde gay. Émerger, immerger... Il se rend compte qu'il a besoin sexuellement des mecs. Et les femmes le font rêver. Son désir de fonder une famille est toujours aussi présent. Enfin, le fait de pouvoir coucher sans remord avec des hommes ne l'a pas éclairé sur la voie à suivre.

À moins qu'il ne rencontre prochainement le gars avec lequel il souhaiterait finir ses jours (et enterrer ses tergiversations) Adam se situe dans ce que je nomme "la zone des hétéros bisexuels" -- il a besoin de temps en temps de baise avec des mecs, mais avant tout d'amour et de sexe avec une femme. La difficulté réside dans la quête de la perle rare -- pas si rare heureusement aujourd'hui, notamment parce que des femmes plus indépendantes, donc plus respectueuses de la nature de leur vis-à-vis, savent apprécier les qualités de ces hommes qu'elles n'ont pas besoin de posséder/contrôler entièrement.


"Adam" de Kristian Zahrtmann, 1914.
Mais pour qu'une femme puisse faire confiance à Adam, il faut qu'il place toutes ses cartes sur la table lors de leurs premières rencontres, avant qu'elle ne tombe amoureuse de ce gars fort et faible, donc irrésistible. Et qu'elle le convainque qu'elle n'essaiera jamais, vraiment jamais, de le "guérir". Adam n'est pas malade. Il a reçu un splendide cadeau de la déesse Pandore: la capacité d'apprécier les hommes, d'aimer les femmes et le désir d'élever des enfants. [La capacité d'apprécier les femmes et aimer les hommes n'empêche plus, non plus, d'élever des enfants si l'on sait semer l'harmonie autour et alentour.]

À propos des très gros cadeaux: ils nous facilitent rarement la vie!

André

jeudi 19 avril 2012

Si François avait eu des mères lesbiennes, il aurait du poil au cul

Marine aurait gaiement baigné dans la diversité.

La campagne actuelle de l'association française SOS Homophobie profite de l'élection présidentielle pour faire passer son message sur l'homoparentalité. Je la trouve réussie parce que sans agressivité et avec une touche d'humour. Les conceptrices/teurs ont su profiter d'une circonstance opportune. L'incompétence, l'impréparation des candidates et candidats est telle (même effroyable pour deux d'entre elles/eux) que le public peut facilement comprendre le message.

Je suis prêt à adopter les pères de Marine comme beaux-fils, et la gamine avec. Imaginez son bonheur d'avoir des papas beaux et dotés d'une joie communicative; même pas déçus si elle ne tournait pas lesbienne. De plus -- c'est juste une intuition -- ils auraient su la persuader que les gens d'autres races ont aussi de grandes qualités de coeur, d'intelligence et d'adaptabilité. Marine, pas sotte, serait devenue une excellente politicienne (au lieu de politichienne). Le monde entier a besoin de telles femmes.

Si François avait été élevé par ces deux mères sympathiques, réalistes, ouvertes au monde (et pas du modèle femelle agressive qu'on voit dans les séries françaises), il ne ferait pas cette tête d'édam enveloppé dans une pellicule de paraffine. Il aurait appris à s'affirmer face aux femmes [vous imaginez: deux mères !!!] et à ne pas se faire entuber par ses adversaires mâles [et en plus lesbiennes...]; bref, il aurait du vrai poil au cul. Et, avec ses qualités naturelles, qu'elles auraient su développer tout en le laissant faire ses expériences, il serait un président suffisant pour la France qui n'en demande pas tant.

Que dire de Nicolas? Avec elles, il aurait reçu l'affection qui lui a manqué. Elles lui auraient aussi expliqué qu'on traite les problèmes à la racines, pas au Kärcher. Et que Louis de Funès était un mec équilibré parce qu'il laissait tomber son cinéma en arrivant à la maison.

Quant aux autres candidats, je vous laisse imaginer ce qui leur serait arrivé. Une chose est certaine: le couple qui a adopté Eva n'aurait pas hésité à consulter une orthophoniste pour aider la petite à maîtriser la langue. Et un psy pour l'éclairer sur l'âme crochue des Français. Jean-Luc, lui, a l'air si heureux avec ses nouveaux papas qu'il ne faut pas le détromper: il croit que c'est lui qui les a adoptés. C'est ainsi qu'il fonctionne.

André





mercredi 18 avril 2012

Les cache-sexe masculins donnent aussi du sel à la vie


Dressons la liste des choses qui nous font du bien. Telle est la proposition de l'ethnologue Françoise Héritier (professeur honoraire à la chaire d'Étude comparée des sociétés africaines au Collège de France) dans son livre Le Sel de la vie paru en février (Odile Jacob). Exemples. "Se demander où l'on était avant de naître plutôt que ce que l'on deviendra après la mort." "Savoir que réfléchir fait passer le temps à toute allure et qu'on en sort tout décontenancé." "Penser au hasard qui fait que nous ne sommes pas contemporains de gens que nous aurions aimé connaître."

Je n'ai pas eu l'honneur de rencontrer Françoise Héritier lorsque j'étudiais l'ethnologie à la Sorbonne. Elle avait fréquenté ces cours trois ou quatre ans plus tôt. Dans ce petit livre, l'auteure évoque l'Afrique où elle s'est rendue à plusieurs occasions, à partir de 1957, et différents peuples qu'elle y a côtoyés. Ainsi, au détour d'une page, dans l'une de ses listes, elle note: "Faire l'inventaire de toutes les sortes de cache-sexe masculins." Commençons l'exercice avec des sacs à billes contemporains, cela nous fera du bien!