mercredi 10 octobre 2012

Pourquoi l'appel de la chair et celui du Christ devraient-ils être incompatibles? Belle série sur Arte.

José, un ange qui sort de prison.

Cinq jeunes novices -- chacun beau à sa manière -- entrent au séminaire des Capucins, à Paris, pour entamer leur formation. C'est le point de départ de la série Ainsi soient-ils diffusée dès ce jeudi 11 octobre sur Arte. Je ne suis pas calotin et pourtant je vous recommande cette plongée dans la vie de l'Église catholique. Non pas pour vous en dégoûter, mais parce que les réalisateurs sont honnêtes et mettent en évidence la bonne volonté des futurs prêtres, leur dévouement, leur générosité et les difficultés qu'ils rencontrent dans leur vocation.

Emmanuel, Yann, Guillaume, José, Raphaël.
Comme toute bonne série Ainsi soient-ils est nourrie de revirements, de coups du sort, de trahisons, de victoires et de grosses interrogations. Ces jeunes mecs pleins de sève sont bien en peine de résister aux embûches tendues sur leur chemin et leurs réactions sont souvent émouvantes. Je vous laisse imaginer, puis découvrir qui cédera à quoi et comment leurs familles les soutiennent ou les combattent. Soyez rassurés, il n'y a pas de scène pénible de pédophilie dans cette première saison de la série. Et les gays font partie de l'aventure.

Ce qui m'émeut, c'est la rigueur et la solitude à laquelle ces futurs prêtres sont destinés. Et les jeunes acteurs sont tellement justes dans leur interprétation qu'on est embarqué avec eux dans cette aventure et les doutes qui les assaillent. Ont-ils vraiment la vocation de "donner tout à Dieu", de faire le choix entre l'amour d'un être humain et celui du Créateur comme le leur impose cette Église obsédée par la croix [la constante mise en scène du supplice, qui vire à la perversité morbide], par la virginité, par la chasteté de ses prêtres et la suprématie masculine [on ne peut pas célébrer la messe si l'on est dépourvu de couilles].

Parallèlement, la série nous fait pénétrer dans les coulisses de l'Église de France, ses intrigues de cour, ses compromissions, ses complots et ses tentatives d'incorporer les lois du marketing pour rameuter les fidèles. Un autre volet nous invite au Vatican, où un pape vieillissant et autoritaire se fait manipuler par son entourage. De Paris à Rome, nous assistons à l'affrontement entre le président de la Conférence des évêques de France (Michel Duchaussoy, mort d'un arrêt cardiaque en mars dernier) et le père Fromenger, ancien prêtre ouvrier, sinologue et supérieur charismatique du séminaire des Capucins (le Suisse Jean-Luc Bideau). Deux grands acteurs.

À g. J.-L. Bideau, à dr. M. Duchaussoy.
Peut-on, aujourd'hui encore, mener des jeunes séminaristes vers une réconciliation avec eux-mêmes tout en leur imposant la chasteté, au lieu de leur proposer un choix? Indépendamment de cela, comment les Églises de toutes confessions peuvent-elles lutter contre la crise des vocations? Par des mesures cosmétiques ou en acceptant une profonde Réforme? Et comment nettoyer ces écuries d'Augias qui abritent les hautes hiérarchies, impliquées dans les pires compromissions -- y compris politiques et économiques -- et les ramener à leurs engagements spirituels? Des questions qu'on se pose en suivant cette série prenante.

André

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