jeudi 22 août 2013

Ces gars valeureux -- gays et hétéros -- qui mettent leur vie en danger pour protéger nos libertés


Glenn Greenwald accueillant David Miranda à son retour à Rio.
Chaque nouvel épisode de la guerre que mènent le gouvernement américain et son vassal britannique contre les lanceurs d'alerte révèle un autre aspect de la monumentale culture du bluff et de la fraude développée à Washington et Londres -- ainsi que dans plusieurs États complices. Dimanche à l'aéroport d'Heathrow, le Brésilien David Miranda en a été victime alors qu'il se trouvait en transit. Miranda, 28 ans, est le compagnon du journaliste Glenn Greenwald, 46 ans, -- l'homme qui révèle semaine après semaine le contenu des documents que détient l'Américain Edward Snowden réfugié en Russie. Invoquant une loi antiterroriste d'exception, la police anglaise a retenu le jeune Brésilien durant neuf heures pour l'interroger sur ses activités et celles de son entourage, sans qu'il puisse faire appel à un avocat ni informer qui que ce soit de sa rétention. La police a aussi confisqué son ordinateur, une clé USB et son téléphone.

Écrivain, journaliste et blogueur, Glenn Greenwald a émigré au Brésil en 2005 pour vivre avec Miranda car les États-Unis ne reconnaissaient pas le mariage gay et ne délivraient pas de permis de séjour à son compagnon. C'est, écrit-il dans son premier livre polémique, l'élection de Bush fils qui l'a changé. Avant, il ne s'impliquait pas en politique. Mais voyant le président abuser de son pouvoir et créer cette paranoïa du terrorisme qui a changé la mentalité américaine, Greenwald s'est fait l'avocat des droits constitutionnels des citoyens. C'était visionnaire, on le comprend aujourd'hui où plus de 2000 compagnies privées aux États-Unis font leur beurre en conseillant le gouvernement, les entreprises publiques et privées ainsi que les télévisions sur le "danger" que présente le "terrorisme" international et comment se "protéger" en attaquant préventivement.

Bradley Manning, scandaleusement maltraité en prison militaire.
Je me souviens des articles de Greenwald dans Salon, lorsqu'il soutenait le soldat Bradley Manning, gay et solitaire, dont la motivation était noble et patriotique. La condamnation est tombée hier: 35 ans de prison. En 2011 je crois, Greenwald avait aussi expliqué comment des agents du FBI recrutaient de jeunes musulmans innocents, les endoctrinaient pour en faire des terroristes, finançaient leurs préparatifs et les dirigeaient sur une cible militaire aux États-Unis ou en Iraq où les gars se faisaient cueillir juste au moment de lancer leur attaque. Sans comprendre qui les avait trahis. Et toute la gloire de leur arrestation retombait sur le FBI... Au sujet d'Edward Snowden qu'il a longuement interviewé à Hong-Kong, Greenwald déclare: "Il savait pertinemment que ce qu'il faisait allait pour l'essentiel bouleverser sa vie et probablement la détruire [...] en prison, voire pire."

À Rio, l'appartement du couple a été cambriolé récemment et l'ordinateur de Miranda volé alors que Greenwald commençait à publier des extraits des documents que lui avait transmis Edward Snowden. On peut imaginer que les visiteurs faisaient partie des services secrets américains... Les articles de Greenwald paraissent sous l'égide du quotidien britannique The Guardian où une équipe travaille sur les documents fournis par Snowden et a déjà fait l'objet de plusieurs intimidations. La rétention de David Miranda à Londres est à prendre comme un avertissement supplémentaire pour les journalistes: votre famille n'est pas à l'abri. Car tant le Guardian que Greenwald dans son blogue ont révélé des secrets qui mettent à mal la réputation des services secrets américain et britannique, détruisant toute apparence de respect des règles démocratiques.

Et la présidence d'Obama n'a rien changé aux États-Unis. Greenwald estime que seuls des gens oeuvrant en dehors du système seront capables d'apporter un réel changement politique; il est, dit-il, impossible de collaborer de l'intérieur pour le transformer... Collaborer ou accuser pour faire naître le changement, c'est aussi la question qui se posait aux homosexuels militants de ma jeunesse. Elle nous a souvent divisés. En Occident, nous sommes parvenus à la situation actuelle en pratiquant un peu des deux. On assiste actuellement aux derniers soubresauts de ceux qui peinent à nous encaisser. Alors que dans d'autres parties du monde, la lutte ne fait que commencer; et ceux qui s'engagent paient un prix exorbitant. Mais comme le dit Greenwald au sujet de Snowden, le courage est contagieux!

André

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