samedi 16 août 2008
Bernard et ses femmes radieuses, "parfums du mois"
Bernard [baptisons-le de ce prénom] est un homme ensoleillé, début de la quarantaine, le plus souvent flanqué d'une femme radieuse -- aussi radieuse que les précédentes. J'ai fait la connaissance de Bernard l'été dernier. Je l'ai d'abord observé, lui, ses femmes et ses potes: son interlocutrice/teur a toujours l'impression d'être le centre du monde. Un soir que nous n'étions plus que cinq ou six hommes sur la plage, nus (tous), hétéros (à part moi) et que nous discutions de choses ou d'autres, il a raconté que parfois, dans le bain turc de son club de fitness, des pédés s'astiquaient en le dévisageant fixement. Il n'était pas choqué, mais trouvait la marque d'admiration inappropriée en ce lieu.
J'ai demandé à Bernard pourquoi lui, d'allure si sportive, ne nageait presque jamais. Il m'a expliqué qu'il souffrait d'un problème lombaire qui s'aggravait constamment et le rendrait paralysé à plus ou moins longue échéance. L'eau froide n'était pas indiquée. Il a parlé de ses douleurs avec retenue, des médicaments; des activités professionnelles et de loisir qu'il devrait peu à peu abandonner. Sans plainte.
Je ne sais pas grand chose de Bernard, sinon qu'il me compte parmi ses nombreux amis. Nous nous croisons de temps en temps. Nous avons l'occasion parfois de parler de nos expériences intimes. Un parler tolérant, ouvert, vrai -- rare entre mecs. Dans sa phase actuelle, il étudie les techniques et les arts de l'amour, versant oriental. Séminaires avec travaux pratiques en France ou en Suisse. A son âge, j'évoluais dans des milieux semblables.
A la fin de l'été, j'avais fait la connaissance de sa guide ès énergies sensuelles et nous nous étions étreints, elle et moi, nus et heureux comme si nous nous étions reconnus d'une vie précédente. Elle parlait allemand, portugais et arabe. Aussi, lorsque Bernard s'est pointé avec une compagne brune et frisée, deux mois plus tard pour une petite bouffe avec la bande, je l'ai serrée dans mes bras et lui ai souhaité la bienvenue en allemand. J'avais retiré mes lunettes pour souffler sur la braise du barbecue et elle m'a répondu en français (avec un accent portugais). C'était la nouvelle femme radieuse, riant de ma boulette, Léa.
Bernard et ses copines me rappellent les marchands de glace ambulants de ma jeunesse: dans leur assortiment, ils mettaient toujours en évidence le parfum de la semaine ou du mois.
Lorsqu'il me donne l'accolade pour me souhaiter bonne route, je fonds. C'est si rare un homme encore jeune qui embrasse un vieillard (même encore jeune). Je fonds d'amitié, mais ne ressens rien. Je ne suis pas amoureux du splendide Bernard. Alors que dimanche dernier, pendant que j'embrassais Léa [qui ne sort plus avec lui -- bizarre ce mot pour des gens qui, en général, rentrent ensemble!], je ressentais chaleur et affection passer entre nous. Pourtant, je ne suis pas amoureux de Léa la radieuse. Mais les femmes savent mieux délacer le corset qui étouffe leurs émotions que nous, les hommes, dévisser notre armure. Lorsque je serre Bernard dans mes bras, je retiens mes sentiments, lui probablement aussi -- tous deux pour des raisons différentes. Pas avec Léa.
|| Ulysse
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