Le coup de génie d'un patron français futé et généreux

En Suisse, on se moque (à juste raison) de la prétention française. J'ai l'occasion aujourd'hui de m'incliner devant la réalisation de Dominique Laure, à la tête de plusieurs sociétés de transports entre Saint-Étienne-de-Montluc (Loire-Atlantique) et Saint-Loubès (Gironde), qui a su allier efficacité et générosité. L'une des bases de la bonne conduite des affaires, de plus en plus ignorée aujourd'hui, c'est de se préoccuper sincèrement des conditions de travail des collaborateurs. Pour améliorer le pouvoir d'achat de son équipe sans modifier les salaires, le patron de Laure Transport a eu l'idée de proposer à chaque employé/e qui le désirait une voiture en location à un euro par jour -- sans que cet avantage ne leur soit imposé par le fisc. Depuis mi-avril, c'est au volant d'une Clio neuve qu'ils peuvent ciculer.

"Chaque salarié décide de la durée de location de sa voiture", explique le PDG. Le véhicule leur revient à 250 euros par an, la société ne fait payer la location que pour les jours travaillés alors que les employés peuvent en disposer sept jours sur sept. L'assurance et l'entretien sont compris dans ce prix. Seul le carburant reste à leur charge. "En gros, cela coûte mille euros par voiture par an à l'entreprise." Et c'est là que Dominique Laure est fort: il affirme ne pas faire preuve de philanthropie. Pour lui, "ce n'est pas un sacrifice, car il ne faut pas oublier qu'un employé qui se trouve bien traité est plus performant et stable". En France, le secteur des transports est en mal de recrutement et le taux de renouvellement du personnel y est particulièrement important. Dominique Laure reconnaît aussi que "l'avantage du salarié est incontestable, pour certains c'est équivalent à un treizième mois".

Pour Dominique Laure, les charges sociales sont aujourd'hui trop élevées en France et pénalisent les entreprises. Il n'était donc pas question d'augmenter les salaires. Alors, s'est-il interrogé: qu'est-ce qui est partagé par tous et qui grève souvent le budget familial? La réponse est apparue comme une évidence: la voiture. En effet, hors carburant, un véhicule revient en moyenne à 2000 € par an. Il a donc décidé de proposer une voiture neuve à ses cent salariés. Et pour que cet avantage ne soit pas imposable, le patron a déniché la combine: le bénéfice de la voiture n'est pas rattaché au contrat de travail. L'entreprise facture 5 euros la location à la journée, mais le contrat publicitaire en paye 4. Le contrat publicitaire? C'est le logo de la société, il est apposé sur chaque véhicule. La voiture est la même pour tous: une Clio diesel cinq portes très économe. Des arguments convaincants pour fidéliser ses salariés et en attirer de nouveaux. Et comme une idée qui a fait ses preuves en engendre d'autres qui rapportent, le PDG de Laure Transport propose son système clé en main à d'autres sociétés.

|| Ulysse