jeudi 21 octobre 2010

Tandis que le camarade qui m'a étreint sur cette couche...

Court extrait et traduction libre du poème Chant de moi-même tiré des Feuilles d'herbe du poète américain Walt Whitman (1819-1892). Contemplez l'intensité de ce portrait photographique (vers 1854) d'un grand visionnaire, chantre de la camaraderie virile, du corps et du monde.
Je me célèbre moi-même et me chante,
Et ce que je m'approprie tu te l'approprieras,
Car chaque atome en moi t'appartient à toi aussi.
Je vais me rendre à la lisière du bois, ôter mon accoutrement et me mettre nu,
J'ai follement besoin de me sentir au contact de l'air.
La vapeur de mon propre souffle,
Les échos, les clapotements, les chuchotements, la racine d'amour, le fil de soie, la fourche des jambes et la tige grimpante, [...]
Le son des mots qu'éructe ma voix projetée dans l'agitation du vent,
Quelques bisous, quelques accolades, une étreinte,
Le jeu des reflets et de l'ombre dans les arbres alors que s'agitent les souples rameaux [...]
La sensation d'être en pleine forme, la vocalise de midi, le chant de mon lever du lit face au soleil. [...]
Retiens ce jour et cette nuit avec moi et tu connaîtras l'origine de tous les poèmes. [...]
J'accueille chaque organe et attribut de mon corps, comme de tout gaillard soigné,
Pas un centimètre, pas un fragment n'est méprisable, il n'y a rien à rejeter.
Je suis comblé -- j'observe, danse, ris et chante;
Tandis que le camarade qui m'a étreint et aimé sur cette couche passe la nuit et dort à côté de moi, puis se retire à l'aube sur la pointe des pieds,
Laissant des paniers couverts de serviettes blanches qui comblent la maison de leurs biens,
Je vais remettre à plus tard le fait de m'y résigner et vais hurler à mes yeux
De ne pas le suivre du regard le long de la route.

1 commentaire:

  1. J'ignorais que Walt Whitman était homo. C'est idiot, je n'avais jamais eu la curiosité de regarder Wikipédia. Merci pour cette découverte, même si cela n'ajoute ni n'enlève rien à son œuvre. Je trouve votre blog d'un grand intérêt.
    A propos d'un autre billet, j'ai eu la chance que mon compagnon des années sida survive à ce virus attrapé en 1983. J'en serai éternellement reconnaissant au destin. Je n'en dirais pas autant pour mes amis de l'époque...

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