mardi 9 août 2011
L'étreinte fugitive ou la pénétration des corps et des âmes?
Dans le blogue de photos Passionate Furry Sexy Men voué à sa passion des hommes velus, Scottgeol décrit son amour en peu de mots. "Mon compagnon est absent actuellement et il me manque terriblement -- la sensation de sa peau et de ses poils contre moi, son odeur envoûtante. J'aime l'intimité que nous partageons lorsque nous faisons l'amour et que lui et moi ne formons plus qu'un." En regard d'une photo de pénétration, il commente: "Mon amour tout autour de moi: chaleur parce qu'il me serre étroitement. Oh, l'embrasser! ne devenir plus qu'un, et l'orgasme qui complète le circuit..."
Plus complexe est le discours de l'écrivain Daniel Mendelsohn. Je viens de lire The Elusive Embrace (L'Étreinte fugitive, J'ai lu, 2011) qui m'attendait depuis des années dans l'une des piles de bouquins disséminées chez moi. Cet essai zigzague entre des textes antiques et la vie de l'auteur. Il dévoile quelques secrets de sa famille juive et les récits enjolivés qui les recouvrent; raconte la paternité de substitution qu'il exerce auprès d'un petit garçon, Nicholas, auquel il s'attache prudemment; décrit son désir des hommes -- il dit "les garçons", parce qu'il se détache rapidement. Tout cela forme la "grammaire de son identité", à la fois brillante, ramassée et bavarde.
N'ayant pas la version française sous la main, je résume ici un passage (page 73 de l'édition Vintage Books) où il aborde la différence et la ressemblance. Les hétéros qui font l'amour à une femme, écrit-il, savent à quoi cela ressemble d'être à l'intérieur d'une autre; et les femmes connaissent ce que c'est de ressentir l'autre en soi. En revanche, deux hommes gays qui baisent ne font pas l'expérience de l'altérité puisque chacun connaît ce que son partenaire est en train de ressentir. La relation sexuelle entre deux hommes réduit la différence à la ressemblance. Donc, la relation entre gays peut sembler parfaite car la connaissance de ce que vit le partenaire est réellement possible. Mais puisque c'est déjà connu, l'acte est d'une certaine manière inutile. Peut-être, conclut Mendelsohn, est-ce la raison pour laquelle tant de gays multiplient les relations à l'infini, comme si l'approfondissement était impossible.
J'espérais qu'on avait dépassé la théorie selon laquelle le développement psycho-sexuel des gays serait incomplet. Je prétends qu'on peut rencontrer autant de mystère chez un mec qu'auprès d'une dame. La femme est d'emblée différente et bien fou celui qui prétend la comprendre. Il faut plus de temps pour se rendre compte que le mec qu'on a dans la peau est aussi un mystère. Un passionnant mystère doté de deux poings, entouré de poils et de muscles, ce qui ne facilite pas la vivisection. Faute de ténacité, beaucoup de gays choisissent les amours éphémères; et beaucoup d'hétéros le divorce.
André
L'expérience hétéro est très riche si elle est vécue dans l'attention portée à l'autre. Et l'expérience homo est différente, je suis d'accord, mais pas moins complexe, à condition qu'on ne s'arrête pas en chemin comme le fait Mendelsohn, d'après ses bouquins que j'ai lus (pas tous). Il est, me semble-t-il, un homme dépourvu du don de la sensualité "spirituelle": il possède l'impatience du consommateur moderne malgré toute sa connaissance livresque des Anciens. Peut-être aura-t-il encore le temps de progresser plus avant en Orient dans ses études, mais la connaissance intellectuelle ne remplace pas l'expérience.
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