Lutte turque à l'huile : que cherches-tu au fond de ma culotte ?

Les origines de la lutte à l'huile remontent à l'époque sumérienne, probablement au IIIe millénaire avant notre ère, où des gars à poil s'enduisaient le corps pour rendre les prises plus aléatoires. Les lutteurs turcs ont adopté la culotte de cuir actuelle, qui pèse environ 13kg, pour répondre aux exigences de la pudeur islamique vers le Xe siècle. Elle est seyante et met le torse en évidence. Si j'ai bien compris, il faut passer la main dans la culotte de l'adversaire et l'immobiliser à la verticale, tête en bas, pour gagner la partie. En Turquie, ces athlètes représentent la crème de la virilité. Au repos, ils manifestent un esprit beau joueur et fraternel. Leur gestuelle de combat avec ses incursions au-dessous de la ceinture, au plus privé de la culotte, ne connaît pas la fausse pudeur. On est entre mâles et c'est du sport.
Ils ne semblent pas encore influencés par la crainte de l'homosexualité qui pollue les contacts entre mecs aux États-Unis et en Europe depuis les années 1970. C'est la "révolution sexuelle" qui avait amené le sujet sur le devant de la scène. Et les milieux sportifs entretiennent cette phobie, confondant l'orientation gay et la notion d'efféminé. Il faudrait leur ouvrir l'esprit, comme aux religieux butés, en leur expliquant les découvertes du psychiatre suisse Carl Gustav Jung (1875-1961), pionnier de la psychologie des profondeurs (celles de l'âme et de la culotte).
Le rêve dit "du phallus" a marqué une étape déterminante dans la carrière de Jung. Mais c'est de l'anima qu'il est question ici en relation avec la tendresse fraternelle que l'on peut observer ci-dessous entre ces jeunes mecs. L'anima chez le mâle et l'animus chez la femme sont les principes (archétypes) du sexe opposé qui sont déposés en nous. L’anima est ainsi une image innée de la femme chez l’homme, la part dite féminine de notre nature. Elle est perçue dans nos rêves -- quelle que soit notre orientation sexuelle -- et permet de relier le conscient à l'inconscient. Je ne sais pas si Jung l'affirme, mais on peut concevoir cette connaissance du vécu féminin comme un souvenir de vies précédentes où l'individu actuel aurait été femme. Et vice-versa. Ce souvenir profondément enfoui nous permet d'équilibrer notre vie présente. En tant qu'observateur rapproché des hommes, je suis souvent impressionné, voire ému de constater combien certains gars d'un abord très viril manifestent aussi beaucoup de sensibilité (et non pas de sensiblerie) en s'accordant aux situations.
Comment l'écoute de son anima équilibre-t-elle la vie d'un beau macho? Elle lui permet de ne pas se sur-identifier en suivant les caractéristiques machistes de la culture environnante. Cela l'aidera à transformer l'agressivité (qu'il ressent en lui -- ou que son milieu attend des hommes) en une combativité créatrice, une capacité à vivre en harmonie avec le monde, à s'imposer sans écraser ni tuer. La lutte turque en donne un bon exemple. Elle vous aide à canaliser vos forces vers une compétition saine (à l'opposé de la boxe); elle vous donne une bonne connaissance des possibilités de votre corps; vous enseigne à anticiper les réactions de votre opposant; elle vous libère de la fausse pudeur.
Cette intuition, ce feeling corporel vous pouvez les transférer à votre relation amoureuse. Vous avez appris à écouter et anticiper chaque intention, chaque mouvement du lutteur que vous tenez entre vos mains (et jusqu'au fond de sa culotte). Alors, écoutez ce que suggère votre anima. Au plumard, il s'agit aussi d'un corps-à-corps. Une seule différence: si tout se passe bien, chacun y est gagnant !

André