Nando, un jeune garçon, se tient au pied de la croix dans une église de Buenos Aires et se demande pourquoi le torse de ce Christ quasi nu le trouble. Il y revient de temps en temps après l'école. L'homme en plâtre coloré a la taille d'un adulte et l'enfant pressent que cette rencontre est vitale. Ses camarades se moquent de lui car il n'a pas de petite copine. Il se sent persécuté, comme Jésus. Il vit ses premiers émois sexuels devant le crucifié, alors que les autres garçons regardent les pages des sous-vêtements féminins dans les catalogues. Nous sommes dans les années 1950 et les jeunes gars ne disposent que des reportages chez des Indiens d'Amazonie pour voir des seins nus et des entre-jambes floutés. Sinon, il y a le dictionnaire médical et quelques livres d'art. Nando me racontera plus tard comment il a construit tant bien que mal son identité gay entre le dieu qui expie nos péchés, le crucifié nu, le péché mortel de l'homosexualité et un catholicisme machiste, mais célibataire.
Dans
Jesus and the Queer Performance Artist, Tim Miller écrit: "Le premier homme dont je suis tombé amoureux était Jésus. Il était tendre. Il était fort. Il ne jouait pas au football [américain] et ne me criait pas dessus; il était bien habillé. L'attirance que j'ai ressentie très jeune fait partie de mon amour pour d'autres hommes. J'imagine qu'il est un amant généreux et sensible qui sait donner et recevoir du plaisir. Il est là pour nous. Prêt à masser des muscles fatigués avec ces baumes odorants dont parle le Nouveau testament. Ma relation à Jésus se trouve en harmonie avec mon identité gay."
Robin Hawley Gorsline, qui étudie les liens entre la violence masculine et la chrétienté aux États-Unis, raconte: "Lorsque j'étais un homosexuel marié, m'efforçant de me couler dans le moule hétéro, je me sentais relié à la beauté de Jésus ainsi qu'au Christ souffrant. Ce Jésus mourant, mort, me semblait plus réel parce que je me voyais aussi périr dans ma vie émotionnelle et conjugale. Ressentir l'agonie de la croix dans ma chair me permettait d'oublier ma propre peine et mon style de vie conflictuel."
Dans
Men's Bodies, Men's Gods, déjà cité ci-dessus, Gorsline affirme: "Les images de Jésus
re-présentent un homme réel. Elles permettent à ceux qui le contemplent d'entrer en relation avec lui en tant qu'amant. [...] Les hommes qui le recherchent avec amour, adoration et désir se lient à lui dans la foi qui les sauve du péché et de la mort en leur offrant une vie nouvelle."
La plupart des "chrétiens" de sexe masculin seraient scandalisés par cette affirmation. Pour eux, l'incarnation de Jésus demeure un concept philosophique. On ne lui connaît pas de vie sentimentale ni sexuelle, cet aspect de sa vie ayant été retranché des textes bibliques... Pourtant, il est écrit: "En lui habite corporellement toute la plénitude de la divinité". Mais d'imaginer le rédempteur en femme aussi bien qu'en mec les ferait trembler d'horreur. Et si ils le représentent avec un pénis (caché) c'est pour lier Dieu au camp des patriarches, des machos et des homophobes.
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Christ au tombeau, Andrea Mantegna. |
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Dans une autre page, Gorsline qui s'est séparé de son épouse vit ses premiers pas hors du placard en faisant la tournée des bars gay de Boston. Il décrit ses rencontres avec des catholiques d'origine irlandaise qui auraient voulu entrer dans la prêtrise et sont profondément blessés parce qu'ils ont été rejetés. "Un soir, un homme qui avait peu bu s'est mis à sangloter. Il m'a raconté combien il avait toujours été
fidèle à Jésus, son premier et seul amour jusque-là. À voix basse, regardant à gauche et à droite pour s'assurer que personne d'autre n'écoutait, il m'a dit qu'il se masturbait parfois en contemplant sa plus belle image de Jésus -- en homme-enfant blond aux yeux bleus, à la peau tendre et qui le regarde avec langueur du haut de la croix."
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Et si le Christ avait été africain! |
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Citation d'un sermon du 17e siècle: "Un jour le grand abbé Serapion fut
trouvé tout nu dans une rue par quelques-uns de ses amis. Émus, ceux-ci lui demandèrent: Qui vous a mis dans un tel état et qui vous
a ôté vos habits? Oh, dit-il, c’est ce livre qui m’a ainsi dépouillé. Il désignait l'Évangile qu’il tenait à la main, ajoutant: Et moi, je vous assure que rien n’est si
propre à nous dépouiller que la considération de l’incomparable
dépouillement et nudité du Sauveur crucifié."
André
Un article magnifique et bouleversant qui ne laissera personne indifférent... et surtout pas moi !!!
RépondreSupprimerMerci André.
Je me permets de le recopier tel quel et de le glisser dans mon dossier intitulé "Divers Trésors".
Belle Fêtes de Pâques.
Philippe
Bonsoir Philippe! Ce serait intéressant -- et généreux de ta part -- si tu voulais bien partager avec nous ce que tu ressens dans la relation que tu entretiens avec Jésus. J'ai transcrit des témoignages nord- et sud-américains. Un exemple francophone nous toucherait plus encore. Je ne sais pas où tu habites, en Europe, dans les territoires français d'Outre-mer (Case des hommes y compte de nombreux amis, comme en Afrique, au Liban, en Asie, notamment au Vietnam). Car ton prénom peut en cacher un autre et c'est plus sympa que de signer Anonyme. Donc, si l'inspiration t'y conduit, apporte-nous un deuxième commentaire; dans ce cas, nous t'en remercions d'avance!
RépondreSupprimerMerci pour cet article instructif sur les motivations de certains hommes à s'attacher à la religion chrétienne.
RépondreSupprimerBonne fête de Pâques.
Bonjour André !
RépondreSupprimerJ'ai bien vu qu'un homonyme nous faisait parfois l'honneur d'une visite dans ces commentaires. Et je suppose que ce n'est pas un pseudonyme-anonyme.
Quant à moi, le prénom avec lequel je signe, ne cache personne d'autre qu'un certain "Philippe" et pour cause: c'est vraiment le mien !!!...
Un Philippe francophone, romand et même vaudois... aimant le vin rouge, son prénom et beaucoup d'autres choses.
Et si tu me disais comment te joindre sans avoir de compte sur Google, c'est bien volontiers que j'échangerais avec toi quelques mots sur mes rapports pas toujours très simples avec Jésus, son Papa et leurs mandataires ici bas !
Bien à toi... dans ton beau jardin qui doit juste commencer à renaître à la Vie !
Philippe, si tu veux m'atteindre hors commentaires, tu cliques sur ma gueule à droite dans le blogue et tu arrives sur la page Profil où, sous ma gueule, tu trouveras "Me contacter".
RépondreSupprimerNéanmoins, dommage que tu ne partages pas au moins une tranche de ton expérience religieuse avec les gars qui lisent les commentaires. Mais je respecte.
même si je pense que le Christ est une figure mythologique et pas vraiment existé, ces interprétations sont très intéressants!
RépondreSupprimerLe corps presque nu de Jésus sur les crucifix m'a toujours choqué.entre le message de partage des évangiles et cette statue d'un suplicié, Je ne comprend pas le lien.
RépondreSupprimerEn plus comme je suis un être sensible adepte de la douceur de la tendresse et des caresses.j'aurais du mal à me masturber devant le calvaire d'un homme, ma compassion me l'interdit.
Mais je comprend que de pauvres être élevé dans le culte de la douleur et de la pudeur fantasme sur le seul morceau de chair qu' on leur permet de contempler
Pâques c'est avant tout le symbole de la resurection de la nature autour de nous plus que la mort de l'hiver
Et la c'est vrai que la chaleur du soleil me donne envi de me mettre tout nu ! )
I've been having sexual fantasies about jesus since my childhood in masturbate thinking about him say Andre you ever felt sexually attracted to Jesus?
RépondreSupprimerEduardo: never! I suppose your education was Catholic. In the Protestant churches, you'll find a cross, but without the nailed Jesus: he has risen from the death. And in an Evangelical hall (where I've been brought up) there are no crosses, no holy pictures.
RépondreSupprimerL'homosexualité est une ABOMINATION aux yeux de JÉSUS.
RépondreSupprimerRepentez vous, car l'homosexualité et la masturbation sont tous deux un péché qui conduit en Enfer.
tissu de conneries........
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