Les mauvaises nouvelles sont réjouissantes pour ceux qui ne se sentent pas concernés. C'est le principe de la Schadenfreude allemande, la joie sournoise. Ainsi, on a appris hier que le nouvel et unique porte-avion britannique, le Queen Elizabeth, souffre d'une voie d'eau seulement deux semaines après sa mise en service. Il a coûté 3,1 milliards de livres et, lors de son lancement, la reine Elizabeth II avait déclaré qu'il incarne le "meilleur de la technologie et de l’innovation britanniques". Au même niveau d'excellence que le Brexit...
Les Allemands aussi l'ont dans le cul. Un feuilleton à rebondissements continue à occuper la justice qui se penche depuis 2009 sur la corruption régnant dans le cartel de la gastronomie teutonne, soit l'entente sur les prix des saucisses à griller et du jambon. Plus d'une vingtaine d'entreprises ont été condamnées en 2014 à une amende colossale -- 338 millions d'euros -- pour s'être concertées pendant des décennies afin d'augmenter leurs marges. Mais les plus lourdement taxées ont exploité une faille légale pour éviter de payer et un tribunal régional va de nouveau se pencher sur ce dossier. À part cela, l'ouverture du futur aéroport de Berlin, initialement prévue en 2012, puis souvent repoussée à cause de problèmes de malfaçon et de corruption, est maintenant annoncé pour l'automne 2020...
L'année écoulée nous a permis de comprendre toutes les nuances attachées à l'expression fake news. Car on n'en parlait pas avant que les Américains n'élisent un fake president. Dans la dialectique racoleuse et jamais digne de confiance de ce personnage, fake news signifie mensonge lorsqu'il parle des médias qui le critiquent et rétablissent la vérité. Mais la plupart des tweets de ce président bidon sont farcis d'insultes, de duperies et de désinformation... Voici donc une fake news réelle. Cette année, la Cour suprême des États-Unis a malheureusement dû suspendre l'installation de la Crèche traditionnelle devant le Capitole de Washington D.C. Pas pour des causes religieuses. Simplement, on n'a pas trouvé trois Sages dans toute la capitale pour incarner les Rois mages. Quant à une Vierge, on la cherche encore. En revanche, il y aurait suffisamment d'ânes pour remplir toutes les Étables du pays...
Ce qui suit n'est pas bidon. La vague de dénonciations qui a suivi l'affaire Weinstein aux États-Unis ne s'est pas arrêtée à la frontière suisse. Dans mon pays, ce sont surtout les politiciens catholiques et quelques intégristes protestants qui s'efforcent d'ignorer la séparation entre l'État et l'Église. Pourtant Jésus est clair à ce sujet: "Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu." Voici donc l'affaire du politicien Y.C. (nom connu de tous les Suisses), 40 ans, marié, père de deux enfants, élu du Conseil national, vice-président du Parti démocrate-chrétien (PDC) et président de sa commune dans le canton du Valais. Dans la nuit du 18 au 19 novembre dernier, notre mâle alpha -- qui s'est posé en défenseur de la famille traditionnelle et s'oppose au mariage pour tous -- est interpellé par la police dans le jardin de sa maîtresse qui l'a dénoncé pour harcèlement récurrent et qui refuse de lui ouvrir la porte. Il est ivre.
La suite du scénario est concoctée par un cabinet d'avocats après les premières révélations dans les médias. Y.C. se déclare en congé maladie de son mandat pour suivre un traitement contre sa dépendance à l'alcool et reconnaît seulement un comportement de "gros lourd" envers les dames. Mais des femmes, dont plusieurs politiciennes actives au niveau national, décrivent un comportement extrêmement choquant, du harcèlement sexuel manu militari -- le mec a gradé dans l'armée. Et des confrères reconnaissent que les parlementaires mâles ont souvent des attitudes et/ou des paroles déplacées vis-à-vis de leurs collègues féminines. Pendant ce temps, Y.B. disparaît, ne se présente pas aux convocations du parti gardien des valeurs conservatrices pour débattre de son avenir politique. L'excuse: sa démission du Conseil national ne constitue pas un aveu de culpabilité, mais une mesure pour "protéger sa famille." Quelle prévenance !
Le harcèlement est un problème qui remonte à l'homme des cavernes. Ces gars qui pelotent au lieu de charmer, je les plains vraiment car ils manquent de la plus élémentaire capacité à aimer sa prochaine ou son prochain, ainsi qu'à se projeter dans l'avenir, à établir un plan de carrière raisonné, adapté à leurs vraies valeurs (s'ils en ont développé) et à leurs faiblesses. Ces faiblesses personnelles -- tout le monde en a -- ils doivent apprendre à les diagnostiquer et à trouver le moyen d'en guérir, si c'est possible, sinon à choisir un chemin de vie qui ne leur soit pas préjudiciable. Un mec coureur de jupons ne va pas prêcher urbi et orbi les valeurs dites chrétiennes (et souvent crétines) de la famille béton, indivisible, pieuse, aimante et charitable. Oui, je les plains parce qu'ils ont manqué de parents et de professeurs capables d'être des modèles et des mentors. Et parce qu'ils n'ont qu'une idée en tête: arriver, diriger, dominer, spolier.
La complicité mâle séculaire devrait évoluer vers une entraide généreuse et inflexible pour que les roméos de bas étage puissent amender leur conduite ou soient forcés de dégager. Et que les femmes apprennent à se défendre sans crainte de devenir victimes de leurs revendications justifiées. Nous, les pédés qui regardons ces guignols du mariage, cessons de ricaner avec eux -- c'est pas ça la solidarité masculine. Et soyons reconnaissants du privilège que nous avons conquis de haute lutte, dans les pays développés, de pouvoir jouir de l'amour et de l'amitié masculine (avec bénéfices) sans avoir à tricher ni payer.
André
C'est parfait. Tu es en pleine forme...
RépondreSupprimermais ne pas oubliez l'Italie. On a tout!!!
RépondreSupprimerpourquoi passe-t-on de Y.C. à Y.B. ?
RépondreSupprimerIl existe des femmes agresseurs ?
Comme beaucoup de mecs, je suis moi aussi très mal à l'aise par rapport à ces affaires de "mains baladeuses" révélées en rafales... J'apprends d'ailleurs que même le chef d'orchestre suisse Charles Dutoit serait impliqué (comme si le monde de la musique pouvait être épargné.)
RépondreSupprimerJe me sens sali par tout cela et espère n'avoir pas alimenté cette vision déplorable sur les femmes. Parfois, j'aurais envie d'ouvrir la fenêtre et de crier à mon quartier: "Moi, je suis pédé depuis toujours, donc innocent!" J'y serais d'autant plus habilité que, malgré mon envie, je n'ai jamais osé avoir un geste déplacé face à un mec, non plus, ce qui m'a sans doute fait perdre de nombreuses occasions. Trop peur de me ramasser un râteau...
Par ailleurs, je me sens au bord de l'overdose face à ces lynchages médiatiques de coupables plus ou moins avérés et devant tous ces appels à la dénonciation. Je comprends que ce qui a été tu et caché trop longtemps puisse déborder un jour comme une fosse à purin. Mais il y a des trucs qui sentent vraiment trop mauvais. Oui, la loi est là pour protéger et pour punir et c'est bien. Mais, en même temps, c'est un peu comme si chacun(e) n'était plus responsable de sa propre intégrité et de sa propre sécurité. Si j'en réfère à mon expérience, on a toujours une part (même infime) de responsabilité dans ce qui nous arrive des autres. Je n'ai jamais été vraiment harcelé. Mais il m'est arrivé d'être importuné par des "gros lourds"... On m'a mis la main aux fesses (ou ailleurs) dans le bus et j'ai parfois trouvé cela très désagréable...
Mais je l'ai réglé séance tenante sans bruit, sans poussière. (Et pourtant, je suis loin d'être un malabar.) J'avouerai que, parfois, je me suis senti même flatté par ces attentions. Je n'ai, par exemple, pas porté plainte chez mon employeur pour avoir été nommé plusieurs fois "plus belles fesses masculines de l'équipe" par mes collègues féminines. Ce scrutin était secret et que je n'ai été informé que lors de mon départ... Par ailleurs, je me suis trouvé une fois en sérieuse difficulté avec un mec dont j'avais trop envie. Un inconnu, une vraie baraque que j'avais accepté de suivre chez lui. Trop chaud, trop impatient et finalement brutal. Un quasi viol qui m'a laissé quelques blessures d'amour propre, ainsi qu'une autre à présenter à un toubib très peu gay-friendly... C'est probablement mon côté "protestant culpabilisé": j'ai pensé que je l'avais cherché et n'aurais jamais eu idée de porter plainte.
Je sais bien que rien n'est comparable à rien. Mais voilà pourquoi ce battage actuel, s'il est nécessaire, me met aussi mal à l'aise. Et, pour le moment, la lecture de ce post n'a rien éclairci pour moi...
Désolé les gars de vous avoir infligé tout ça...
RépondreSupprimerC'est vrai qu'à la relecture (...et présentée ainsi !), toute cette prose ci-dessus me paraît bien indigeste et totalement inintéressante.
Mes excuses à ceux qui l'auront lue...
...avec la promesse que l'on ne m'y reprendra plus !
Bon Noël... quand même !