mardi 21 avril 2020

L'amour et la sexualité au temps du choléra ou du nouveau virus



J'ai lu le roman de Gabriel Garcia Márquez L'amour au temps du choléra (El amor en los tiempos del cólera) avec passion, d'autant plus que c'était peu d'années après le début des ravages causés par le sida en 1985. Mais je ne me souviens plus du récit. J'avais l'âme saccagée par les décès de nombreux camarades et l'assassinat de mon grand amour. Mais Wikipédia réanime la mémoire.



Le romancier colombien, prix Nobel de littérature, situe l'action à la fin du XIXe siècle. Florentino, un jeune télégraphiste, promet l'amour éternel à Fermina, ravissante écolière. Cet envoûtement dure trois ans, puis la jeune femme choisit un riche médecin pour époux. Florentino se réfugie dans la poésie et entreprend une carrière de séducteur impénitent. Pourtant sa vie n’est tournée que vers un seul objectif: se faire un nom pour mériter celle qu’il ne cesse de désirer durant plus d’un demi-siècle.


Pendant ce temps, Fermina obéit aux conventions et préjugés du milieu dans lequel évolue son mari. À la nouvelle de la mort du médecin, Florentino reprend espoir de conquérir celle qu'il n'a jamais oubliée, malgré ses nombreuses conquêtes... Aujourd'hui, comment vit-on l'éloignement de celles ou de ceux qu'on aime et dont on a besoin?



Si l'on est confiné, les réseaux sociaux n'offrent pas l'indispensable chaleur du contact corporel, tout au plus des bavardages stériles. On se fait rabrouer parce qu'on ne remplit pas les conditions de l'autre -- apparence, âge, pratiques sexuelles -- ou qu'on n'accepte pas de fricoter sans précautions. Ce qui revient à dire: "Je suis mon partenaire sexuel le plus fiable. Je connais mes habitudes, je peux me satisfaire en me donnant un peu de peine. Vu les circonstances, je vais me demander de prendre plus de temps pour m'amener à l'orgasme, beaucoup plus de temps. De bien respirer, de faire une halte délice entre chaque étape et de ne pas sauter illico hors du lit dès la dernière goutte pour aller pisser ou fumer."


Prendre soin de soi, c'est une première étape indispensable en cas de confinement. Elle nous amène à entreprendre une réflexion sur notre besoin d'amour et sur la manière dont nous y avons répondu jusqu'à maintenant. Lui avons-nous consacré assez de temps, ou l'avons-nous négligé en faveur des demandes incessantes du sexe ? Est-ce que l'amour et notre sexualité vont changer après le bouleversement ? Qu'est-ce qui était si beau, si réconfortant avec Paul et me manque actuellement ? Pourquoi la relation avec lui s'est-elle distendue ? Parce qu'il ne répondait pas à mes attentes dans le domaine de..., ou du... ? En fait comment aurions-nous pu trouver un accommodement ?



Le confinement pourrait se développer en méditation. Réflexion sur mes désirs secrets, mon être profond, ce que je ne connais pas vraiment, faute d'y accorder du temps. Enquête à soutenir avec du dessin, de la peinture, de l'écriture; par l'improvisation dansée, chantée, grattée sur une guitare. En feuilletant un album de photos, en fouillant dans un carton où se cachent mes selfies les plus délurés [dans ma jeunesse c'étaient des polaroids qui se développaient en deux minutes, loin des regards du garçon de laboratoire et du marchand]. Ces trouvailles nous aideraient à inventer comment nous allons naviguer entre la sensualité, l'amour et la sexualité dans un avenir proche. Afin de tirer plus de substance, plus de jus, plus de frissons d'une relation durable...




Oui, un splendide défi illustré par la fable d'un maître bouddhiste. C'est l'histoire d'un homme qui habite près d'une montagne imposante. Chaque jour, il se demande ce qu'il verrait au sommet si il la gravissait. Il décide enfin de réaliser son projet et se rend au pied de la montagne. Il rencontre un promeneur à qui il demande: "Comment était l'ascension et qu'avez-vous vu au sommet ?" Le marcheur lui décrit le chemin et ce qu'il a vu. Et notre bonhomme songe: d'après ce que ce type me dit, il me semble que c'est fatigant. Il faut que je trouve une autre voie pour monter. Il reprend sa marche sur le sentier qui longe le pied de la montagne jusqu'à ce qu'il rencontre un autre voyageur. Il lui demande: "Quelle voie avez-vous empruntée pour aller jusqu'au sommet et qu'avez-vous vu là-haut ?"




Le marcheur le lui raconte. N'arrivant pas à décider quelle voie suivre, notre bonhomme  questionne encore une quinzaine de passants. Finalement, il prend sa décision. Tous ces gens ont partagé leurs expériences et m'ont décrit ce qu'ils ont vu au sommet. Je suis bien renseigné, je n'ai plus besoin d'y aller.



Notre bonhomme ne se mettra jamais en chemin pour gravir la montagne et découvrir ce qu'il aurait pu voir de ses propres yeux, ni ressentir les effets de l'effort dans ses muscles et finir par la contemplation du panorama au sommet... Chaque jour, nous lisons ou voyons des reportages sur l'état du monde, sur celui des différentes sociétés qui le peuplent. On nous abreuve de recettes, d'opinions, d'évangiles et de fausses informations... Pourtant nous avons besoin de connaître par nous-même ce que réserve le chemin qui conduit à la sagesse, la liberté et la connaissance.

André










3 commentaires:

  1. Belles images et beaux mecs, André, et aussi de sages réflexions mais les mettre en pratique est plus facile à dire qu'à faire.

    RépondreSupprimer
  2. Un vraie réflexion, tournée vers l'autre et l'extérieur, en cette époque de selfies et d'auto-victimisation.

    RépondreSupprimer