Mars attaque les connasses et les couillons

Une géologue engoncée dans la combinaison spatiale (tirée des poubelles d'un magasin de farces et attrapes) traîne son pauvre cul sur le sol ocre du désert de Mojave. Elle sort d'un module d'habitation rouillé (abandonné depuis les années 1950), conçu pour coloniser la planète Mars. Nous sommes dans le documentaire de Richard Dindo The Marsdreamers (Les Rêveurs de Mars). Après quelques splendides images de la planète rouge et d'un désert états-unien, nous rencontrons des doux dingues persuadés qu'elles/ils seront la première femme, le premier héros à poser pied sur Mars, quitte à mourir là-bas. Cela rappelle les mecs qui se prennent pour Jésus-Christ ou Napoléon. Ces braves gens grassouillets et moyenâgeux militent en faveur de la conquête de cette nouvelle Frontière (=territoire vierge) du fantasme américain... Jamais la NASA ne les engagera: peu sportifs, ils sont moches alors que les astronautes sont des belles femmes et des types baraqués, ils n'ont jamais piloté d'avion, etc...

Leur utopie c'est la colonisation fraternelle de Mars afin de rétablir l'esprit de pionniers dont sont empreints leurs mythes fondateurs. Ils ne le disent pas trop clairement, mais ils veulent échapper à ce qui leur déplaît dans l'Amérique d'aujourd'hui. Ils veulent participer à la création d'une nouvelle race d'humanité (comme leurs ancêtres qui massacrèrent les autochtones)... Les personnes qui cultivent de beaux rêves me plaisent. Celles qui réalisent leurs fantasmes aussi. Mais ces Américains qui n'ont probablement jamais quitté leur coin de pays, qui ignorent tout des ressources territoriales, spirituelles et culturelles qu'offre le reste du monde sont juste de pauvres couillons. Ils cherchent à s'évader de la réalité plutôt qu'à s'y crocher et apporter leur contribution.

Le film de Dindo est bancal. J'aimerais voir un deuxième volet pour discerner le pourquoi et le comment de ces utopies. Ces gens veulent-ils échapper à la fin du monde, au retour sanglant du Seigneur si souvent annoncé là-bas? Est-ce qu'ils ont secrètement honte des guerres déclenchées ou soutenues en leur nom depuis 60 ans? Ont-ils raz-le-bol de la télé-réalité, des pipoles, des politiciens véreux, des évangélistes dévoyés, des sportifs hypersexualisés et de leurs écoles calamiteuses?

Je leur suggère d'aller contempler la richesse d'invention, malgré la pauvreté des moyens, que connaissent d'autres continents. Peut-être pourraient-ils se réaliser là-bas, ou chez eux, après en avoir tiré quelques exemples. Plutôt que de périr sur Mars, ils pourraient se confronter aux défis de notre planète et vivre une aventure réelle... Elles/ils disent qu'ils sont prêts à donner leur vie pour la planète rouge; c'est la preuve de leur mythomanie.

Ulysse