mardi 2 février 2010
Vous ne seriez pas pédé, par hasard?
"Si après que je quitte cette terre, vous vous rappelez un jour de moi et désirez plaire à mon fantôme, pardonnez à quelque pécheur et faites un clin d'oeil à quelque laideron." Cette citation du journaliste Henry Louis Mencken (1880 - 1956) figure en épitaphe sur sa tombe, à Baltimore. Ce matin, dans la rue, j'ai fait un clin à un laideron. Elle m'a tiré la langue. Autre citation de Mencken: "Avez-vous déjà observé un crabe sur la plage, en train de ramper en marche arrière pour rejoindre l'océan et manquer sa cible? C'est comme cela que fonctionne l'esprit des humains." J'ai l'esprit d'escalier. Lorsqu'on me fait une remarque qui mériterait une réponse ciblée, elle me vient trop tard. Pour remédier à cet handicap, une solution: préparer les réponses d'avance. Exemples.
Un gars vous lance: "Vous seriez pas pédé, par hasard?" Si vous aviez une bonne raison d'anticiper cette éventualité, vous rétorquez: "Pourquoi? Vous avez envie de vous faire mettre?" Le débat est clos... Dans une interview où l'on cherchait à le coincer, le patineur Johnny Weir (encore plus folle que qui vous savez) a répondu: "Il y a des choses sacrées que je garde pour moi: le nom de la personne avec laquelle je couche, et celui de ma crème pour les mains."
Madame, votre chef M. Borre vous propose galamment de vous reconduire chez vous un soir où vous avez fait des heures supplémentaires pour lui. Par hasard, la route choisie passe devant chez lui et il vous propose de prendre un verre. Vous répondez: "Volontiers, j'aimerais bien faire la connaissance de Mme Borre; un ami m'en a beaucoup parlé." Comme par hasard, Mme Borre est absente ce soir-là. Vous lancez, toujours aussi charmante: "Alors, une autre fois!" Vous avez évité de le rembarrer ouvertement et vous avez ouvert une brèche avec cet "ami".
Si, après quelques verres partagés, la tablée vous demande à vous et à votre compagnon, qui fait l'homme et qui fait la femme, répondez en coeur: "Tous les deux." Ou: "On fait toujours l'homme. Vous voulez bien faire la femme?"... Très agaçants, ces gens qui, lorsque vous les informez de votre orientation amoureuse et sexuelle, s'empressent de vous dire: "J'ai de très bons amis homos." Pour montrer combien ils sont tolérants et branchés. Rétorquez avec émotion: "J'en aussi!!!" Ou: "J'ai quelques amis hétéros." Puis rempilez: "Il faut bien dire que pour eux, la vie est très difficile. Tant sur le plan sentimental que sexuel, c'est pas une réussite. Avec tous ces divorces, ces familles dysfonctionnelles. Et les enfants qui tournent mal..." Montrez combien cela vous fait de la peine; et faites un clin d'oeil à quelque laideron.
Ulysse
Merci de penser aussi à nous. En tant que femmes (la minorité numériquement majoritaire) on a autant besoin de se défendre que vous. Même plus, probablement. Et souvent, on est trop complaisantes, par habitude et par mépris pour les remarques stupides. Cela ne nous aide pas.
RépondreSupprimerL'hétéro ne se rend pas compte qu'il projette son mode de vie hétéro dans chaque espace qu'il occupe. Ma femme, mes enfants, mes petits-enfants, depuis mon divorce, ma voiture familiale, leur école... De nous il ne veut rien savoir, sauf si ça titille sa curiosité pendant une minute. Jamais il demande: ton ami il va mieux, il a pu rentrer de l'hôpital?
RépondreSupprimerDes chercheurs britanniques se sont penchés sur le problème du western: dans la vie réelle, est-ce celui qui dégaine en premier (style western spaghetti) qui abat l'adversaire, ou est-ce le gentil (style Hollywood) qui abat le méchant alors même qu'il a dégainé après lui? (Voir Libé d'ajourd'hui.) Leur conclusion: la réaction est en général moins précise que l'action planifiée (il dégaine le premier).
RépondreSupprimerDonc: planifions nos réactions même si c'est l'autre (dans notre cas) qui agresse. C'est un réflexe à entraîner.
Tant de gens ont été éduqués dès l'enfance à penser et dire du mal sur les gays que votre truc ne va pas les changer. Mais si une répartie cinglante vous fait du bien...
RépondreSupprimerDans l'armée amèricaine la règle du Don't Ask Don't Tell (pas de question sur l'homosexualité, pas de rèvèlation) imposée aux homos (si non ils sont chassés de l'armée et privéS de leurs bénèfices financiers ou des etudes) va jusqu'au fait qu'ils ne peuvent pas indiquer le nom et l'adresse de la personne qu'ils aiment pour l'informer s'ils meurent.
RépondreSupprimerUn collègue hétéro me critique parce que je serais "toujours en train de parler d'homosexualité" (cela m'arrive peut-être une fois par mois au bureau). Si vous êtes hétéro essayez, ne serait-ce qu'un jour, de supprimer toute indication dans ce sens. Ne mentionnez ni votre épouse/mari, ni vos enfants et leurs grands-parents, ni votre foyer -- ou la copine/le copain. Retirez les photos familiales qui sont sur votre bureau. Changez les genres dans la conversation, dites "il" en parlant de votre femme, évitez tout ce qui pourrait faire croire que vous êtes hétéro, y compris de parler de foot. Changez de vie et ... comprenez!
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