vendredi 31 octobre 2008
Circoncision collective tous les cinq ans chez les Gorani
Les Gorani, groupe ethnique musulman partagé entre plusieurs pays des Balkans, maintiennent leurs traditions ancestrales, dont cette cérémonie du Sunet, circoncision collective célébrée tous les cinq ans dans les villages des montagnes au Kosovo. Cela les aide à se différencier des autres groupes. Même les Gorani de la diaspora émigrés en Scandinavie reviennent au pays pour faire circoncire leur fils. L'an dernier, 130 garçons âgés entre dix mois et cinq ans ont passé sous la lame dans les villages de Donje et Gornje Ljubinje.
Cette cérémonie a duré quatre jours et commencé par la prière des anciens. Les futurs circoncis étaient habillés comme des petits rois et couverts de cadeaux -- principalement des billets de banque. Il y a eu de la musique, des lutteurs Pelivani recouverts d'huile. Mais dire que les garçons étaient à la fête...
L'opération était conduite par Zylfikar Chichko, barbier âgé de 70 ans qui officie sans anesthésiant -- ainsi le veut la coutume. "Cela fait si longtemps que je pratique dans la région de Prizren! J'ai dû en circoncire au moins 15'000 à 20'000." Il passe de maison en maison. Ses assistants maintiennent l'enfant immobile. Au son des prières et des sanglots, il enduit le membre de teinture d'iode, empoigne son scalpel, taille dans la chair, puis termine en appliquant de la poudre antiseptique. La date du prochain Sunet local est déjà retenue pour 2012.
Selon la tradition musulmane, le prépuce représente la seule partie féminine du corps masculin. En s'en séparant, le jeune garçon se coupe définitivement du monde de la mère pour être accepté dans la société masculine. Beaucoup d'hommes ignorent néanmoins la signification de leur mutilation. Le coran ne parle pas de cette coutume, quelques hadiths la mentionnent. Chez les peuples majoritairement circoncis, on estime qu'un pénis taillé -- signe d'appartenance et de soumission au groupe -- est plus beau qu'une bite naturelle, considérée comme impure. On ne laissera jamais une fille musulmane épouser un incirconcis. La dextérité et l'hygiène des barbiers les plus compétents fait la différence entre une opération bien menée et des suites, parfois fatales, qui provoquent une hémorragie, des cicatrices douloureuses durant toute la vie, des déformations, la perte du frein, la disparition des glandes servant à humidifier le glands. Les médecins américains aussi, parfois, occasionnent une vie entière de souffrance sexuelle par leur maladresse ou leur ignorance de l'anatomie subtile du pénis.
|| Ulysse -- Reportage: Afp, Spiegel Online, Reuters.
mardi 28 octobre 2008
L'arbre généalogique (3): et si on n'aime pas (que) les poires?
Le lendemain du repas qui avait réuni une partie de ma famille maternelle, je ne regrettais pas d'y avoir participé. Pourtant, ce qui nous avait liés dans la petite enfance était devenu bien ténu. Seul importait l'héritage psychologique reçu de nos ancêtres. Par exemple, la liberté avec laquelle ma mère peignait, cuisinait, improvisait. Son détachement matériel: pour elle l'argent et les forces disponibles servaient à payer les études de ses enfants, soulager la misère, inviter des étrangers et des solitaires à sa table. Côté ombre: elle était incapable d'exprimer son amour, ses colères ou de reconnaître ouvertement ses erreurs. Trop de pudeur aussi autour des morts qui avaient marqué son enfance et la jeunesse de son mari -- mon père. Avec le soleil, nous recevons aussi l'ombre en héritage; à nous de développer les qualités et de fouiller les ténèbres pour nous libérer peu à peu du passé de nos parents comme du nôtre.
Je me disais aussi -- et là, il faut se pincer: si ces gens que j'ai observés hier vivent (presque tous) selon les préceptes de leur religion, relativement chastement avant le mariage, puis dans la fidélité conjugale, alors moi... j'ai connu bibliquement bien plus d'hommes et de femmes qu'eux tous collectivement. Pourtant j'ai aussi traversé des périodes de monogamie harmonieuse lorsque j'étais en couple. Mais le reste du temps: So many men, so little time. Il y a tant d'hommes à aimer et la vie est si brève...
Jeune adulte dans les années cinquante, après avoir lu le bouquin One in Twenty qui traitait de l'homosexualité -- un des seuls à l'époque -- je m'amusais en sortant des cours à compter le nombre de personnes entassées dans la voiture de métro. Jusqu'à vingt, c'était moi le pédé de la statistique. A quarante, il devait y en avoir un autre, ou une lesbienne. A soixante, nous étions trois... Alors, combien étions-nous de bisexuels ou d'homos présents à ce repas d'anniversaire? Mystère.
Des types et des nanas mal dans leur peau, certes il y en avait, comme partout. Mais d'où venait leur souffrance? De la misère sexuelle habituelle? D'une bi- ou homosexualité mal ou pas assumée? De leur profession? Des soucis parentaux? De la maladie? D'une foi qui n'aurait pas trouvé le lieu où s'épanouir? D'une soumission au milieu ou à leur propre passé?
Il y a des moyens de s'en sortir, des portes à ouvrir, puis à franchir pour s'émanciper. Et un prix à payer. Reprenons le mythe de l'arbre de "l'expérience du bon et du mauvais" en Éden. Dieu avait dit: "Le fruit de l'arbre au milieu du jardin vous n'en mangerez pas et n'y toucherez pas, sinon vous mourrez". Ève et Adam y croquèrent, bien sûr, parce qu'ils en avaient marre de ne manger que des poires. Ils ne moururent pas, mais furent chassés, laissant derrière eux le confort nacré de l'inaction, de la candeur et de la crédulité.
Et Dieu constata: "L'humain est devenu comme un autre nous-même, qui a l'expérience du bien et du mal." C'est aussi ce que disent les États, les Églises, les sectes, les partis politiques, les grandes familles lorsqu'un membre se rebelle et prend la distance nécessaire à son indépendance pour vivre à contre-courant. Et ça se paie.
|| Ulysse
lundi 27 octobre 2008
L'arbre généalogique (2): la force tellurique des femmes
Le repas de samedi dernier que je passais dans les branches de l'arbre généalogique a aussi été l'occasion de reprendre contact avec celles et ceux que je n'avais plus croisés depuis le dernier enterrement. J'ai constaté la force tellurique de la majorité des femmes présentes. Tandis que nous les mecs, plus nous vieillissons, moins bien nous cachons l'insignifiance de notre existence -- fêlure ou manque d'humilité dont peu d'entre nous savent guérir. En général, les femmes partent dans la vie active avec moins d'attentes (sauf en amour) et peuvent ainsi s'étonner elles-mêmes.
Quelques-uns de mes cousins sexa- et septuagénaires ont encore fière allure et exhibent un sourire chaleureux. D'autres, plus fragiles, n'en sont pas moins sympathiques. Mais derrière la plupart de ces visages barbus ou non, combien de distance protectrice, quelles grimaces de souffrance et d'anxiété! Il y a les soucis professionnels: les industries mécanique et alimentaire, le transport international étaient représentés dans l'assistance. Et puis, chez un type qui croit que les couilles remplacent l'introspection, que de questions jamais exprimées (et donc sans réponse)! Et encore: chez un homme honnête et religieux (ou seulement religieux) qui n'a pas appris à démêler ses rêves et à examiner lucidement ses désirs, que de paniques, de dérapages; que de dégâts moraux et physiques...
On comptait aussi parmi nous une petite poignée de gars... inatteignables, qui ne voulaient pas échanger trois mots avec le mec gay que je suis. Comme s'ils craignaient de ne pas être suffisamment vaccinés. La dureté et/ou la souffrance s'inscrivait en lettres majuscules sur leur visage. Leur corps était trop raide, ou au contraire tordu.
J'admire celles et ceux qui vieillissent avec grâce, dont la beauté devient plus chaleureuse, la bonté moins gourmande. Ces femmes qui ont acquis quelques qualités masculines, par exemple de s'affirmer sans devenir étouffantes. Ces hommes qui ont développé des traits féminins intérieurs, comme l'écoute attentive, ou un courage que ne se... décourage pas si tôt.
Cette peinture du Caravagio prend le prétexte biblique de l'apôtre Thomas l'incrédule pour encourager les gars à localiser leurs plaies.
C'est peut-être parce que plusieurs cousines -- surtout par alliance -- m'avaient si chaleureusement serré dans leurs bras que m'est revenu le souvenir d'un stage avec Frédéric Leboyer imbriqué dans une semaine de soufisme. Pourquoi, homme sans descendance prévue, m'intéressais-je à la musique que le bon docteur Leboyer faisait intervenir durant la grossesse et l'accouchement? Là et dans d'autres stages, j'ai compris combien la vie avant notre naissance est déjà riche d'expériences. Les femmes qui ont été foetus, puis berceau nouricier d'un autre foetus, ont un accès privilégié, sinon déchirant, au monde caché. Plusieurs mythes de la création parlent de la terre-mère qui se fend pour donner naissance à l'être humain. Les mecs n'enfantent que la colère à force d'emmagasiner la bile et l'effroi. Il existe pourtant des moyens masculins de rejoindre l'expérience féminine et de gagner en humanité. A chacun de trouver son chemin.
|| Ulysse -- Photos: statuette africaine de femme enceinte et saint Thomas du Caravagio, empruntées au photoblog de... Thomas.
dimanche 26 octobre 2008
Journée d'automne dans les branches de l'arbre généalogique (1)
Un petit village du Jura suisse, Bellas Aquas en latin, à quelques kilomètres de la frontière française. La "peuffe" (le brouillard) s'est dissipée, dévoilant un ciel d'hiver, étincelant. Direction la Grande salle. Les tables ont été dressées pour 85 convives, les bouquets disposés dans des courges creusées. C'était hier à midi; nous étions réunis pour fêter le 70e anniversaire de l'un de mes cousins et les 40 ans qu'il a passés avec son épouse. Première étape: les retrouvailles pendant l'apéritif. Les Vaudois du temps passé, lorsqu'ils n'avaient plus tout l'arbre généalogique en tête, demandaient: "Et toi, tu es à qui?"
Si je connais la génération qui m'a précédé et la mienne, j'ai rarement rencontré les représentants de la lignée suivante et jamais les viennent-ensuite. Nos grand-parents communs, Elise et Isaac, tous deux nés en 1871, avaient engendré très bibliquement treize enfants, dont ma mère après cinq garçons. Des treize, huit ont atteint l'âge adulte et leur postérité s'élève à trente-six; ma fratrie est composée de cinq filles et garçons, ce qui me laisse 31 cousines et cousins, dont celui que nous fêtions. Les descendants des trente-six sont au nombre de cent, tout rond. Et ainsi de suite... Notre rassemblement d'hier était donc une rencontre en petit comité!
Sur les tables, en plus des fleurs et des couverts, les organisatrices avaient distribué la photocopie des cantiques que nous allions chanter au cours du repas. Cette famille est fortement imprégnée de religion, une foi de communauté aussi close que le monastère -- ce que l'extérieur classe comme secte protestante (importée de Plymouth, en Angleterre, au milieu du XIXe siècle). Et je souris chaque fois que, pour un anniversaire, un mariage ou un enterrement, je me trouve confronté aux mêmes hymnes. Ils les connaissent par coeur à force de les entonner comme on prend son sédatif. La cousine germaine en face de moi ressemblait à une poule hypnotisée en chantant "Si nous devons un jour quitter ces lieux bénis..."
Chaque ramification des religions importantes de la planète [la scientologie n'en est pas une] a reçu en héritage une pincée de sens en même temps qu'un plein seillon de merde. Aux in/fidèles de trier. Pendant que nous chantions, j'observais la noble assistance et me demandait qui obéissait encore aveuglement (ou par paresse) aux diktats de la secte et qui s'était émancipé/e. Certains parmi nous se sont enfermés dans un système encore plus rigoureux -- les purs parmi les purs -- alors que d'autres ont pris le large. Samedi, nous respections une trêve provisoire; tout le monde murmurait la même rengaine. "Si nous devons un jour quitter ces lieux bénis, Nous nous retrouverons Là-Haut pour toujours réunis." N'ayant aucun plan pour l'avenir, j'étais heureux de passer ce bel après-midi d'automne sur les branches de l'arbre généalogique. En me rappelant que Dieu nous a donné les amis pour se faire pardonner d'avoir créé la famille.
|| Ulysse
La maison où Elise et Isaac ont élevé leurs treize enfants.
vendredi 24 octobre 2008
DSK: l'arme du suicide politique se trouve dans le slip
Ainsi donc, Dominique nique nique Strauss-Kahn, qui porte à gauche, fait l'objet d'une enquête sur un cas de népotisme lié à sa relation sexuelle avec une subordonnée. C'est ce que j'appelle un cas d'inceste professionnel. Je ne me place ni au plan juridique ni n'émet de jugement moral; je considère uniquement les dégâts collatéraux que la baise inconsidérée peut provoquer dans la vie d'un mec.
Il y a l'inceste privé: une relation charnelle avec un membre de la famille (y compris la belle-soeur ou le beau-frère). Et l'autre type d'inceste, celui qui bousille une carrière. Nommé à la tête du Fonds monétaire international au moment où l'institution avait perdu une grosse part de ses recettes (les intérêts générés par des prêts iniques aux pays les plus endettés), DSK était attaqué pour le manque de transparence de sa gestion alors qu'il préparait l'avenir du FMI. D'autre part, la Russie et le Japon lui menaient la vie dure parce que le poste de directeur avait de nouveau été attribué à un Occidental.
Or que fait ce gros couillon installé à Washington pour améliorer son CV international en vue de la présidentielle française en 2012? Au lieu d'honorer une femme discrète (et étrangère à sa carrière) tout en déshonorant son épouse, il tend à ses ennemis la verge pour le fouetter (et peut-être l'évincer). En d'autres termes: l'arme du suicide politique était dans le slip. L'avenir dira si le suicide est raté. Ricanements à Washington où l'on méprise les Français: Sarko se bat contre les moulins à vent et Dodo exhibe une bite-nique contrite.
Comment se fait-il qu'un tacticien si habile puisse compromettre sa carrière par un écart de conduite aussi bête? A chacun ses réponses: sur le talon d'Achille des mâles, sur l'obstination de la petite tête de noeud quand elle n'en fait qu'à sa tête, sur le sabotage inconscient, le sentiment de péché... Je perçois dans le visage de DSK les marques d'un tempérament audacieux, exigeant, à la fois généreux et égocentrique, séducteur, épicurien, impulsif, combatif, ambitieux, impatient, intolérant, colérique, dominé par la mère et le cul (pour compenser). J'imagine -- mais je puis me tromper -- que sa troisième épouse, ancienne femme-tronc de TF1, impatiente de devenir première dame de France (comme l'était Bill de devenir première dame des Etats-Unis si Hillary avait été élue président), j'imagine donc que Mme Sinclair est une complice plutôt qu'une compagne. Co-dépendante du pouvoir suprême, elle lui passe tous ses caprices comme le font en général les épouses des alcooliques. Tout cela dans l'espoir que DSK guérira dès qu'il aura atteint le sommet...
Juste pour remettre... l'église au milieu du village: ce visage d'une femme forte, co-dépendante d'un Dieu qui l'a "aspirée vers Lui" cette semaine. Soeur Emmanuelle disait: "Je crois qu'on fait un contresens sur les paroles de la bible. Ce n'est pas 'heureux les pauvres', mais 'heureux ceux qui ont une âme de pauvre'. Le modèle n'est pas la misère noire, il faut la combattre au nom de la dignité humaine, de la justice. Ce qui est préconisé, c'est de ne pas s'attacher aux biens matériels, ne pas se rendre malade parce qu'on ne peut pas se payer le dernier gadget."
|| Ulysse
mercredi 22 octobre 2008
L'art de l'équilibre: toute vie traverse des hauts et des bas
Artiste de l'éphémère, Dan s'exprime à ses heures entre une rivière, la Singine, et un lac, le Léman. L'an dernier, il élevait des tours et des barrages de pierres; cette année il a construit des murs. Et l'an prochain? Il passera "à une autre étape". Sera-ce encore du Land Art? Dan n'est pas homme à vendre la peau de l'ours.
Les premières créations de Land Art ont vu le jour dans l'Ouest américain à la fin de années soixante. Situées dans la nature, utilisant des matériaux offerts par la nature, exposées aux éléments, elles étaient et sont toujours précaires par définition, hors des galeries et des musées, visibles de tous (sans billet d'entrée). Expérience offerte au passant, et non pas réservée aux élites dites cultivées. Pour faire le pédant, je qualifierai ce moyen de communication d'art péripatétique (du grec peripatein, se promener) parce qu'il nous fait signe au cours d'une promenade, au détour d'un chemin, à l'improviste.
Mon pote Dan, la quarantaine, utilise l'énergie du lieu, "cela me relie à la terre mère, cela m'ancre, car j'ai tendance à naviguer avec la tête dans les étoiles". La simplicité brute des matériaux récoltés sur place lui "purifie le mental" pendant qu'il évalue l'équilibre entre les pierres, cherche leur centre de gravité, jauge celles qui conviennent à sa construction. Il observe à distance, prend en mains, palpe les formes, choisit en fonction de la pierre précédente. "Tout est lié. Certaines pierres ne conviennent pas, ne sont pas mûres. Je les rejette même si je pense qu'elles m'ont appelé."
Une occupation de solitaire? "Ma copine m'encourage. Elle dit que c'est quelque chose qui me ressemble." Dans la conversation, on perçoit que Dan est en quête perpétuelle du sens de la vie. Enfant et jeune homme, il a connu des épreuves déchirantes, des coups du sort presque insurmontables. Il lui a fallu du temps. Il a surmonté. A mes yeux, ses créations expriment harmonieusement les efforts pour se reconstruire, les passages d'une étape à l'autre. Élévation, fragilité, protection, équilibre, destruction toujours possible. Et force d'âme pour aborder de nouvelles installations, continuer "à chercher l'équilibre -- toujours fragile -- dans le déséquilibre général". Il considère qu'il se trouve sur cette terre "pour y mettre de la beauté", indépendamment, précise-t-il, des valeurs du monde actuel.
Petite anecdote sur la précarité du Land Art. Durant l'été, Dan avait construit ce mur sinueux au bord du Léman, sur la plage de la Budaz que gère la commune d'Épesses (célèbre pour sa chasse aux naturistes bien sages qui y prenaient le soleil depuis des décennies). Or l'employé communal a reçu l'ordre de démolir l'oeuvre et de niveler le sol. Ce qui fut fait. Poliment, Dan a adressé une lettre à la mairie pour en demander la raison. Madame le Syndic (c'est ainsi qu'elle se désigne) lui a répondu, le priant "de considérer la Budaz comme une plage et non comme une salle d'exposition à but artistique". Dont acte.
|| Ulysse -- Photos: Dan -- Pour tout message à Dan, commande de photos, création de tour dans un jardin, prière d'utiliser la rubrique commentaires ci-dessous. Ulysse transmettra à l'intéressé.
dimanche 12 octobre 2008
Parfois, l'exercice physique est plus efficace que l'antidépresseur
Selon 36.9°, le magazine de la Télévision romande diffusé mercredi dernier, deux études récentes sur la dépression arrivent à la même conclusion: les antidépresseurs ne sont pas plus efficaces qu'un placebo (un comprimé qui ne contient aucun principe actif) pour traiter des dépressions légères ou moyennes. Au début de l'année, le New England Journal of Medicine a publié les résultats d'une méta-analyse sur les produits de dernière génération qui démontre que l'efficacité de cette classe de médicaments a été largement exagérée. Comment, pourquoi? Parce que les dossiers des essais cliniques effectués par les laboratoires exagèrent l'efficacité des médicaments et omettent de publier les études négatives.
L'effet placebo de ces produits peut s'avérer important -- mais faut-il le payer au prix du Prozac (Fluctine), de l'Efexor, du Deroxat, du Zoloft ou du Seropram? Sans parler des réactions secondaires qu'ils entraînent (par ex. nausées, trouble des fonctions sexuelles, etc. ce qui n'ajoute rien au bonheur de vivre) qu'un comprimé de sucre et d'amidon ne provoquerait pas. Beaucoup de personnes consultent un généraliste ou un interniste pour lui demander de traiter leur souffrance morale. La solution la plus expéditive pour le médecin, comme pour le patient, c'est le médicament. Peu de consultants envisagent la possibilité de sortir du cabinet médical sans une prescription! On ne les aurait pas pris au sérieux...
Prendre au sérieux ses peines d'âme et de coeur, ce n'est pas les abrutir avec des médicaments. Il existe d'autres recours plus efficaces à long terme, parce qu'ils examinent les racines du problème -- du moins le tentent-ils -- et permettent de trouver une solution (peut-être partielle) ou d'envisager de vivre en paix avec son tourment. Encore faut-il donner du temps au temps... Et l'on découvre un nouvel art de vivre, effet secondaire positif provoqué par ce genre de cure.
L'un des meilleurs remèdes connus à la dépression moyenne, c'est l'exercice physique régulier. Des chercheurs ont démontré que l'activité physique chez la souris augmente la synthèse d'une molécule qui a des effets antidépresseurs. Sur la base de ces observations, il va falloir déterminer si les effets de l'exercice sont les mêmes chez l'être humain. Mais qui financera une étude sans produit coûteux à la clé? A l'hôpital psychiatrique de Cery (près de Lausanne), on propose différents types d'exercices collectifs ou individuels aux patients, sans abandonner les antidépresseurs à ce stade.
Pas besoin d'être déprimé/e pour bénéficier des effets calmants et revigorants de l'exercice. La marche à un bon rythme, le jogging, la corde à sauter, le vélo, la rame, la natation améliorent l'humeur, abaissent le taux d'anxiété et de fatigue durant plusieurs heures après l'activité. Selon le psychologue Jack Raglin, des entraînements plus intenses peuvent provoquer une impression d'anxiété immédiatement après l'exercice. Mais la sensation se dissipe après 5 ou 10 minutes et fait place à des sentiments positifs durables.
Mais le surentraînement peut causer une dépression chez des gens qui se croyaient à l'abri. Bien fait!
|| Ulysse Photos.-- Le gymnaste Andreï Kravtsov. Aviron: ils rament pour Aussiebum.
samedi 11 octobre 2008
Comment le dalaï lama fait taire les dissidents
A l'occasion des JO en Chine, le dalaï lama a multiplié les déplacements pour sensibiliser l'opinion à la violation des droits de l'Homme au Tibet. Puis il s'est effondré à son retour en Inde. Hospitalisation à Bombay pour gêne abdominale et grande fatigue; convalescence; annulation des conférences prévues en Allemagne et en Suisse en ce mois d'octobre; enfin, extraction hier à Delhi de calculs à la vessie.
Le journaliste Roger Willemsen (qui l'a rencontré il y a une dizaine d'années et de nouveau récemment) a remarqué les traces d'un changement important chez le chef politique et spirituel de 73 ans. Son rire communicatif a perdu en fraîcheur et sincérité virile, son regard s'est voilé. Est-ce le surmenage? L'insuccès de ses dernières campagnes politiques? La superficialité des foules d'Occidentaux qui se pressent à ses conférences en quête de bouddhisme espresso? L'imbécilité des peoples qui l'entourent, comme Sharon Stone déclarant que les tremblements de terre (ce printemps en Chine) résultaient du mauvais kharma chinois concernant le Tibet? Ou la vauité des has been qu'on lui jette dans les pattes, comme la mère Royal, le mannequin Bruni et Mme Line Renaud en France?
Il se pourrait aussi que le conflit opposant depuis de nombreuses années le dalai lama aux bouddhistes tibétains qui rendent un culte à la déité Dholgyal (Shugden) le pousse toujours plus loin dans l'usage de la puissance totalitariste qu'il exerce sur ses compatriotes. [Ainsi évoluent trop d'hommes politiques.] Dholgyal, si je l'ai bien compris, fait pourtant partie d'une longue tradition. (Un oracle de cette déité avait indiqué le chemin de l'exil au tout jeune dalaï lama à la fin des années cinquante.) L'interdiction absolue de ce culte a été expressément étendue à notre pays. Le 16 août dernier, une assemblée des Tibétains de Suisse et du Liechtenstein a décrété, sur l'ordre du dalaï lama, que les fidèles n'avaient plus le droit de vénérer cette déité, ni de fréquenter ceux qui enfreindraient le commandement, ni de soutenir financièrement les monastères de cette conviction au Népal et en Inde. De plus, ceux qui critiqueraient le dalaï lama en public devraient être considérés comme faisant partie des alliés directs ou indirects de la Chine.
En janvier 1998, une émission de la Télévision alémanique rapportait des cas de persécution envers des Tibétains fidèles à Dholgyal en Inde. Certains d'entre eux exclus totalement de la société tibétaine. Des moines expulsés de leur monastère, sans possibilité de trouver du travail. Des familles chassées de leur logement qui avait été saccagé par des compatriotes. Des affiches encourageant nommément à tuer telle ou telle personne étaient collées dans les rues par les partisans de la ligne forte du dalaï lama!
Le souriant lama, un chef politique avant tout? Beaucoup parmi les rejetés conservent leur foi en Sa Sainteté tout en pratiquant leur dévotion à Dholgyal. Les Tibétains connaissent la tyrannie depuis des siècles. Rien de nouveau sous le soleil de l'Himalaya.
|| Ulysse
mercredi 8 octobre 2008
Ce que la candidature de Sarah Palin révèle de l'Amérique actuelle
Ce qui suit est un extrait de Mad Dog Palin, un article de Matt Taibbi paru dans le numéro actuel de Rolling Stone. Seul un Américain a le droit de juger son pays ainsi. "Ce qui effraie le plus au sujet de la colistière de John McCain ce n'est pas son incompétence, c'est ce que sa candidature révèle sur l'Amérique" affirme l'introduction. Taibbi se trouvait à Saint-Paul pour le discours d'intronisation de la candidate républicaine à la vice-présidence. A la sortie, il entend une femme coiffée d'un chapeau de cow-boy dire: "Elle me rappelle vraiment ma cousine. C'est une vraie femme. Comme elle."
"A ce moment-là, j'ai compris le cynisme absolu de toute cette manoeuvre électorale accablante. Voilà où en sont les Américains. Vous pouvez envoyer leurs gamins par milliers se faire exploser les couilles au loin sans raison valable, vous pouvez les écraser de dettes gouvernementales, des milliards de dollars année après année, et ils passent joyeusement leur hiver à regarder des émissions de télé-réalité et des matchs; vous pouvez les tromper avec des hypothèques et ne leur laisser que leurs cartes de crédit pour vivre avec des salaires de misère tout en exportant leur emploi en Chine ou en Inde.
Et rien ne semble leur importer aussi longtemps que vous vous rappelez qu'il faut les distraire quelques mois avant les élections, avec ces caricatures débiles qui présentent votre programme présidentiel. Si Sarah Palin ressemble suffisamment à cet archétype bavard de la mégère américaine moyenne, le peuple lâchera son paquet géant de chips, s'essuiera la bouche, se précipitera aux urnes et votera pour elle. Non parce que ce serait raisonnable, ni parce que ça améliorerait sa vie ou celle des autres. Non, mais simplement parce qu'elle fait appel à son narcissisme le plus élémentaire; et parce que l'image qu'il voit à la télé lui rappelle le pauvre con écervelé qu'il regarde dans son miroir chaque matin.
Sarah Palin symbolise tout ce qui va mal aux Etats-Unis aujourd'hui. En tant que représentante de notre système politique, elle vole encore plus bas que ses prédécesseurs; elle est le couronnement de toutes les vilenies du manipulateur Karl Rove. Et plus que tout, elle démontre tragiquement combien peu nous demandons en retour de l'abandon de notre pouvoir politique.[...]
La droite de l'espèce Bush-Rove n'a pas économisé sa peine pour trouver un visage à mettre sur sa politique dégueulasse, inhumaine et catastrophique. Il a su plaquer avec génie la cupidité institutionnelle des huit dernières années sur l'image de la supermère de l'Amérique pavillonnaire. Car il n'existe presque rien au monde de plus malfaisant que ce type de tyran femelle provincial.[...]
Ce qu'il faut comprendre avec le choix de Palin pour vice-présidente, c'est que beaucoup d'électeurs américains n'exigent plus que les candidats présentent un programme politique; ils leur demandent seulement un divertissement médiatique et deviennent leurs supporteurs de la même manière qu'ils sont fans de tel ou tel concurrent de Star Academy.[...]
Forcément, l'image de Barack Obama a elle aussi été construite avec habileté. La différence d'avec celle de Palin réside dans ce qu'Obama représente. Il se bat en faveur de la tolérance, de l'intelligence, de l'éducation et de la patience; il accepte le compromis et la négociation; il est prêt à prendre les difficultés de face -- des qualités dont nous aurons besoin pour notre prochain gouvernement, si nous voulons nous sortir du gâchis dans lequel nous nous trouvons.[...]
Le plus écoeurant avec Sarah Palin, ce n'est pas son manque absolu de compétence, ou le fait qu'elle est une fanatique religieuse, mariée à un séparatiste, ou incapable de donner une éducation sexuelle à sa propre fille, ou une fausse conservatrice qui a augmenté les impôts et utilisé abusivement des fonds d'Etat chaque fois qu'elle le pouvait. Le plus effrayant à son sujet c'est ce qu'elle révèle de nous autres: qu'on peut nous enculer pendant huit ans entiers, et que non seulement nous disons poliment merci, mais que nous sommes prêts à signer pour huit années supplémentaires à condition qu'on nous caresse dans le sens du poil pendant un bref instant avant les élections."
Illustration haut de page de Robin Eley dans The Village Voice cette semaine.
mardi 7 octobre 2008
Pour les Kiwis, cette journée est un peu comme Noël
"Dissimulés au fin fond de la terre (c'est ce que nous aimons) nous, les Kiwis, avons caché un secret. Comme des gamins avant Noël, nous comptons les jours... et quand enfin elle arrive, ohhh lorsqu'elle arrive nous l'embrassons, l'âme libérée, de la seule manière que nous connaissions: nus." Et qui est-elle? La Journée nationale de la nudité que les Néo-Zélandais célèbrent le 19 septembre.
La presse locale est pleine des exploits, personnels ou en groupe, des femmes et des hommes qui se sont manifestés en costume d'Éve on d'Adam ce jour-là. Par exemple des équipes de rugby. (Quant à eux, les All Blacks jouent à poil chaque année sur la plage de Dunedin, mais au milieu de l'hiver, en juillet.) Ou ce jeune vendeur dans un supermarché à Christchurch, Ryan Mornin. Son gérant a déclaré qu'il était le seul de son équipe de douze bouchers à en avoir assez pour jouer le jeu. Paraît que les clientes et les collègues ne se sont pas privés de plaisanteries, partant des pâtés maison (beefcake) pour aboutir aux saucisses (te trompe pas de morceau!); pourtant Mornin a toujours gardé son tablier et le sourire, même lorsqu'il est sorti faire un tour des commerçants du quartier pendant la pause. Sorry mesdames et messieurs, les belles cuisses de Ryan et tout le reste de la garniture sont déjà réservés (he is spoken for)!
Puisque cette manifestation est devenue si importante pour eux ("It's about nude, not lewd. It's about having fun... with your clothes off"), les organisateurs ont lancé le Word Nude Day, un équivalent mondial, qui se tiendra le 6 février prochain. Ils proposent un concours de vidéos dont on peut déjà voir les premières participations sur leur site www.worldnudeday.com. "Cela vous étonne?" demande une participante qui s'empresse d'ajouter: "La majorité des adultes et la plupart des enfants savent comment est fait le sexe opposé!" Autre témoignage: "Quand je suis à poil, mon stress diminue. Habillé, j'ai tendance à répondre agressivement lorsque les gens me font des remarques blessantes. Nu, je suis plus détendu (sans blague) et je me conduis comme un homme civilisé!" Ah! le sentiment de claustration et la claustrophobie qu'entraîne le port de vêtements pas assez amples; il mériteraient une étude sérieuse sur un large échantillon. Pour sourire: voir les vidéos. Par exemple celle des joueurs de golf dans une base de l'Antarctique, de leur balle qui atterrit au fond d'un trou dans la glace et de ce qui s'ensuit.
|| Ulysse
dimanche 5 octobre 2008
>>>>>>>>>>>>>>>>>>Laissez le monstre prendre son envol
Petit rappel concernant la mise en place de la capote. S'assurer que le rouleau se présente à l'extérieur. Saisir le haut du préservatif -- le réservoir -- pour en chasser l'air et éviter ainsi un risque de rupture. Placer le présé sur le gland de la bite en érection en le maintenant d'une main pendant que l'autre main le déroule complètement jusqu'aux couilles.
Durant l'action, si la capote s'enroule sur elle-même, la remettre en place calmement, sans stresser ni attendre. Le petit maniement de la mise en place (et de l'éventuel réajustement) devrait faire partie des jeux et caresses à quatre mains qui rendent la baise et l'amour si juteux.
> "Let the beast go!", pub des préservatifs Durex et de Humo, magazine flamand.
samedi 4 octobre 2008
L'élégance au masculin, c'est aussi pour se séduire soi-même
Voici des hommes et une femme affranchis des codes et pourtant totalement dans le vent automnal de la mode, révélés par le Sartorialist Scott Schuman qui a capté leur image dans les rues de Paris et Milan. L'élégance quotidienne, c'est d'abord se séduire soi-même -- les femmes le savent, les hommes l'apprennent -- c'est aussi se trouver un vêtement dans lequel on est sûr de soi.
L'élégance, c'est enfin lorsque l'habit tombe au pied du canapé (ni jeté en tas, ni plié de manière pointilleuse) et qu'en persistent des traces dans la pupille de celui ou celle qui regarde, traces qui dansent sur la peau nue et la toison des poils.
L'homme, ici à gauche, a choisi des éléments qui se complètent sans en avoir l'air. C'est masculin. La veste et le gilet sont courts (c'est dans l'air du temps). L'homme porte sur lui l'aisance des gens qui n'ont manqué de rien et n'ont pas besoin de le montrer. Pourtant, c'est un séducteur.
Scott Schuman a volé un instant magique de ce couple milanais, elle souriante dans son manteau ajusté à la taille, lui tout de retenue dans son pantalon retroussé pour rouler en scooter. [Cliquez pour agrandir la photo.] La jeune femme a choisi une coiffure simple (dans l'air du temps); elle ne fait pas attendre son mec et dépense plus d'argent à la librairie que chez le tifier. A remarquer: le dialogue entre leurs mises. Et aussi les pompes en liège (dangereuses, d'un goût douteux, mais terrrriblement dans l'air du temps).
Voici un look conceptuellement hyper fort, genre Cousteau pour faire simple. Le jeune gars a trouvé un style qui convient parfaitement à son âge et à sa constitution élancée. Les filles le trouvent sexy, les garçons lui demandent conseil. Où dénicher ces fringues? Chez les fripiers. Notez l'accessoire hyper cool: l'appareil photo.
Aujourd'hui, un mec sans téléphone mobile ou sans sac est un homme incomplet. Il lui manque quelque chose dans les pattes. Au siècle dernier, le mâle bénissait le ciel d'avoir le droit de remplir ses poches. Désormais, dans ses habits cintrés dont les poches sont cousues, il a les mains pleines. Comme les femmes. Et ce que les femmes regardent d'abord chez le bel homme de droite, c'est son sac en cuir. Pour ma part, j'ai remarqué le dessin scandinave de sa jaquette de laine, l'idée insolente (et parfaite) de porter un pantalon kaki avec un haut en bleu marine, et le maillot de corps rose. A part cela, le crâne rasé s'est installé dans nos moeurs; c'est le plus grand bouleversement du look masculin depuis une éternité, un vrai progrès. Qui regrette les moumoutes et les mèches collées?
Hier, la neige a fermé plusieurs cols de montagne. Le manteau blanc de l'hiver est à nos portes et il faudra songer à se couvrir pour ne pas se les geler.
|| Ulysse