"Personne n'est parfait !" Plus j'avance en âge et plus je
rencontre de gays qui ne saisissent pas la pointe d'humour derrière ma
répartie préferée. Parce qu'ils manquent de culture, n'ayant jamais vu le film
Certains l'aiment chaud de Billy Wilder, sorti en 1959.
Rattrapage: deux musiciens de jazz, Joe (Tony Curtis) et Jerry (Jack Lemmon), sont poursuivis par des gangsters et leur échappent en se
travestissant pour s'engager dans un orchestre féminin dont Sugar Cane
(Marilyn Monroe) est la chanteuse. Joe devenu Joséphine flirte avec Sugar
Cane et Jerry devenu Daphné attire l'attention du milliardaire
Osgood...
Billy Wilder
avait fait venir un
travesti professionnel de Berlin pour enseigner aux deux acteurs à
marcher comme des femmes, en serrant les fesses. Selon Tony Curtis, "On avait l'habitude si on avait servi dans la marine." Le film
raconte donc les déboires de deux mecs obligés de s'habiller en femmes pour
sauver leur peau; il évite les thématiques homo ou travelo. On ne voit pas comment les gars opèrent la transition, pas de scène d'épilation ou de maquillage.
Comme d'autres metteurs en scène hollywoodiens talentueux de
l'époque, Billy Wilder était originaire d'Europe. Né en Pologne, il
avait vécu à Vienne et Berlin, puis s'était réfugié à Paris lors de l'arrivée d'Hitler
au pouvoir. Il avait ensuite émigré aux États-Unis. [Nous allons peut-être
observer le phénomène inverse ces prochains mois.] Wilder était revenu en
Allemagne en 1945 sous l'uniforme d'un colonel; il avait été affecté au
montage de séquences filmées dans les camps de concentration. Ces
films étaient destinés à la population germanique. On lui avait aussi
demandé de mettre en scène des acteurs allemands pour ranimer la vie culturelle locale.
C'est ainsi qu'Anton Lang -- qui avait incarné le personnage du Christ dans
Le Jeu de la Passion
d'Oberammergau avant la guerre -- avait demandé l'autorisation de
reprendre son rôle. Sous Hitler, Lang s'était engagé dans une unité
militaire des S.S. Le réalisateur a répondu que ce serait possible à
une condition: qu'on utilise de vrais clous. La mère, le beau-père et
la grand-mère de Billy né Samuel Wilder étaient morts à Auschwitz. Plus
tard, dans un article au sujet de l'Holocauste publié par un journal
allemand, il avait interpellé les négationnistes: "Si les camps de
concentration et les chambres à gaz n'ont pas existé, alors dites-moi:
où est ma mère?"
Voici la perle du film, sa conclusion. Le milliardaire Osgood Fielding III propose à Daphné de l'épouser.
Des critiques ont reproché à Billy Wilder d'être misanthrope. C'est oublier le destin de ses proches.
Certains l'aiment chaud
raconte avec humour comment des femmes et des hommes pris dans une
situation délicate peuvent se démerder habilement, puis tomber dans un
nouveau piège. Le film aborde aussi un sujet dont on parlait peu à
l'époque: la flexibilité du genre, la capacité de développer en soi la
part féminine aussi honorablement que le principe masculin.
André
3 commentaires:
je l'ai vu ce film, il était super j'ai bien rigolé
C'est un de mes films préférés. Je crois que je le connais par cœur. Et la dernière réplique ! Merci de m'apprendre toutes ces choses sur Billy Wilder.
vraiment interessant!!! merci!!!
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