En débarquant l'autre jour à Melbourne pour participer à son 21e Open d'Australie, Roger Federer s'est plaint que les organisateurs aient tardé à prendre la décision de reporter ou non le tournoi à cause de la pollution causée par les incendies. De nombreux sportifs ont craint qu'on ne mette en danger leur santé, mais un seul a déclaré forfait. Notamment par respect envers les Australiens qui sont en train de perdre leurs lieux de vie. Quant aux stars du tennis, elles n'ont pas eu la hardiesse de donner l'exemple en renonçant. Au sujet de l'incertitude des organisateurs, Federer a déclaré que "bien communiquer est la clé de la réussite". Le champion suisse venait d'être interpellé sur les réseaux sociaux de son pays pour son parrainage publicitaire de Crédit Suisse. Les activistes du climat reprochent à cette banque d'investir massivement dans les énergies fossiles.
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On
estime que Federer gagne environ 60 millions de dollars par an rien
qu'avec les publicités dans lesquelles il apparaît. Il
a répondu à ses critiques qu'il prend très au sérieux les menaces liées
au changement climatique. Ses chargés de communication lui font dire:
"J'ai beaucoup de respect et d'admiration envers ces
jeunes qui se mobilisent pour le climat. Je leur suis aussi
reconnaissant
de nous obliger à examiner nos
comportements". Il apprécie qu'on lui rappelle sa
responsabilité comme
individu, athlète et entrepreneur. "Je m'engage à
utiliser ma position privilégiée pour dialoguer avec mes sponsors sur
ces questions importantes."
Douze membres de Lausanne Action Climat ont été jugés pour avoir occupé les locaux de Credit Suisse en novembre 2018, déguisés en Roger Federer. Ils ont été condamnés par ordonnance pénale, avant de faire opposition. Et là, ils ont été acquittés. La semaine dernière, le juge a reconnu que la désobéissance civile pratiquée par ces manifestants pour le climat se justifiait. Ils réclament des comptes aux banques, aux politiciens et aux grandes entreprises parce qu'il y a urgence. Autant dire que ce jugement a été mal accepté dans les milieux judiciaires et politiques de droite, ainsi que par l'industrie du luxe. Car les déplacements perpétuels à travers le monde et le train de vie ostentatoire de Federer servent d'incitation à la consommation pour les foules qui l'adorent.
Vendredi dernier, plus de 10'000 manifestants sont venus de toute la Suisse à Lausanne -- ma ville -- pour célébrer leur première année de lutte contre le réchauffement climatique. La jeune activiste suédoise Greta Thunberg qui était déjà venue en août dernier, était présente. Elle a commencé son discours en prononçant en français "Bonjour Lausanne, ça va bien ?" Puis elle a dénoncé l'inaction. "Ça doit changer". Elle a déclaré qu'elle en était à son 74e vendredi de grève du climat. "Ce n'est que le début (...) Ils n'ont encore rien vu !" Elle a promis qu'elle porterait le message des "grévistes" jeunes et vieux lors de son déplacement cette semaine au Forum économique de Davos (WEF) où Donald Trump devrait également se trouver, s'il ne fait pas faux bond pour une raison évidente.
À la tribune, la militante environnementale et féministe kenyane Njoki Njoroge Njehû a également fustigé le WEF de Davos. Elle s'en est prise à tous les milliardaires du monde, les accusant de piller la planète.
Participer à une marche, c'est symbolique et fort. Le jeune Oleg résume parfaitement ce que j'ai ressenti lors des premières Marches des fiertés, dans les années 70-80, où ne s'aventuraient que ceux qui ne craignaient pas de révéler leur orientation sexuelle en public. Oleg a raison: on reste motivé si l'on garde une hauteur de vue sur tout ce qu'il faudra encore et encore réaliser pour toucher au but. Je suis optimiste; j'ai consacré beaucoup de temps au développement du mouvement de libération homosexuel. Et nous n'aurions jamais imaginé, lorsque nous avons commencé, que nous pourrions atteindre ce à quoi nous sommes arrivés maintenant.
Vendredi dernier, en me joignant au cortège du climat à Lausanne, moi vieux bougre de 84 ans, j'étais tellement ému de voir cette jeunesse déterminée que j'en pleurais à pleines larmes. Me repassaient dans la mémoire d'autres manifs de tous genres auxquelles j'ai participé ou que j'ai observées en tant que journaliste. La Révolution dite culturelle en 1966 en Chine, avec l'intervention violente des jeunes Gardes rouges à Pékin. Les débuts du Mouvement hippie à San Francisco, l'année suivante. Mai 68 en Europe de l'Ouest. Et puis, les cortèges de l'église au cimetière à partir de 1985, ou directement de l'hôpital au cimetière, avec juste une infirmière et une poignée de potes, lorsque les Églises, les sectes ou les familles rejetaient leur malade du sida. Oui, les cortèges de l'espoir et ceux du désespoir.
André
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5 commentaires:
Donc éspérons dans cette jeunesse!
bravo et merci andré !
Il ne faut jamais désespérer de la jeunesse.
Greta Thunberg est un évènement marketing.
Chaque soir, les médias français font la promotion de l'écologie punitive au lieu de parler de la hausse des bavures policières en France, des discriminations à l'embauche, de la chute du pouvoir d'achat...
Si Greta Thunberg (ou ses parents) utilisent des procédés marketing, pourquoi pas ?
Tout est bon pour se faire entendre et la cause en vaut la peine.
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