Les portraits de père et fils ci-dessus ont été captés par Grégoire Korganow en 2011. Oui, nous nous demandons tous à quoi ressemble aujourd'hui une relation idéale entre un géniteur et son rejeton mâle. À quel âge le petit mec se distancie-t-il pour manifester son indépendance, à quel âge le fils mature peut, miraculeusement, devenir le confident de son père, et plus tard inverser les rôles en devenant son protecteur.
Père et fils ci-dessus ne craignent pas le compagnonnage à poil et enregistrent les modifications de leurs deux corps au fil des années. Il est sain pour un garçon de connaître de visu et au plus intime ce que deviendra son corps d'adulte. Et de pouvoir poser les questions qui traversent son esprit
Peau contre peau -- cette marque d'affection si naturelle et
enrichissante -- est me semble-t-il encore rare une fois le fiston sorti
de la petite enfance. L'attention accordée depuis une quinzaine
d'années à l'homosexualité, à la pédophilie et la pédérastie, ainsi qu'à
l'inceste a certainement freiné ces démonstrations entre proches
parents. Les hommes se sentent de nouveau obligés de prouver une virilité sans tache. La "part féminine" qu'on nous demande de développer, cette épice qui rehausse le masculin, est mise à mal par des courants contraires. Au travail, on demande aux mecs d'être "agressifs",
alors que le mot combatif conviendrait mieux. On continue à vénérer les
valeurs guerrières qui, pourtant, détruisent la planète, esquintent les
humains et entraînent tant de dépenses (pensez aux impôts, aux
assurances contre tous les périls, aux mesures de sécurité). Cela au nom de
cette sacrée testostérone qui s'épuise dans le stress au lieu
d'alimenter le plaisir.
Un Scandinave, rencontré il y a bien longtemps au Chili, m'avait raconté les discussions auxquelles il participait durant l'adolescence avec père, grand-père, oncles et cousins. Durant les beaux jours, la famille se retrouvait au bord d'un lac. Les femmes organisaient des sorties à bicyclette entre elles et les hommes allaient nager puis suer au sauna. Suivant l'inspiration, ils parlaient de sport, de livres, de sexe ou d'amour. Plus jeune du groupe, mon interlocuteur ne sentait néanmoins aucune limite dans la conversation grâce à la nudité, cette grande égalitariste. "J'avais envie de devenir aussi solide qu'eux, à l'aise dans la vie. Et quand un cousin parlait de sa petite copine, y compris de leur intimité, le grand-père s'exclamait 'Oh, redevenir jeune homme!' Quelqu'un donnait un conseil. Je voyais bander les cousins, parfois mon père. Et moi, cela me confirmait que je ne serais jamais attiré par les femmes."
André
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Sascha Schneider, Werdende Kraft, 1904. |
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