En 1961, le Concours Eurovision de la chanson avait couronné une ballade prophétique: Nous les amoureux
interprétée par Jean-Claude Pascal. Chanteur de charme au regard
ténébreux, acteur de cinéma qui allait devenir plus tard écrivain, le
viril Jean-Claude (1927-1992) s'était engagé, à l'âge de 17 ans comme
volontaire dans l'armée de Libération du général Leclerc. Il avait été
décoré d'une Croix de guerre. Il avait tout pour faire tomber les
Françaises en pâmoison. Mais il n'en a pas profité, il préférait les
gars, ce que son public a longtemps ignoré. Je peux vous certifier qu'il
était bien un pédé comme on disait à l'époque. À Amsterdam en
1966, je l'ai vu dans une boîte à danser homo. La capitale des Pays-Bas
était un lieu de pélerinage pour nos frères du monde entier (et je m'y
rendais souvent).
"Nous les amoureux On voudrait nous séparer On voudrait nous empêcher D'être heureux Nous les amoureux Il paraît que c'est l'enfer Qui nous guette Ou bien le fer Et le feu. C'est vrai, les imbéciles et les méchants Nous font du mal, nous jouent des tours Pourtant rien n'est plus évident Que l'amour Nous les amoureux Nous ne pouvons rien contr'eux Ils sont mille et l'on est deux Mais l'heure va sonner Des nuits moins difficiles Et je pourrai t'aimer Sans qu'on en parle en ville C'est promis C'est écrit. Nous les amoureux Le soleil brille pour nous Et l'on dort sur les genoux Du bon Dieu Nous les amoureux Il nous a donné le droit Au bonheur et à la joie D'être deux Alors, les sans-amour, les mal-aimés, Il faudra bien nous acquitter Vous qui n'avez jamais été Condamnés
Nous les amoureux Nous allons vivre sans vous Car le ciel est avec nous Les amoureux "
Il y a 61 ans, ce texte composé par Maurice Vidalin était prophétique. Jean-Claude Pascal n'a
révélé son orientation que très tard, pour ne pas briser sa carrière.
Son entourage professionnel était au courant, demeurant néanmoins
discret. Le public n'a rien
déchiffré, malgré l'énorme succès de la chanson."Prophétique" signifie
"apte à voir les grandes lignes de l'avenir". Ce qui nous semblait
inconcevable à l'époque -- à nous militants attelés à la tâche de briser
le secret, le mépris, les discriminations -- est devenu réalité. Du
moins pour quelques nations évoluées.
Le progrès qui semble si naturel aux jeunes générations demeure
néanmoins fragile. Outre l'invasion militaire qui vient de se déchaîner,
et celles qui se prolongent en Asie ou en Afrique, nous pouvons
constater avec quelle violence les racistes, les misogynes et les
homophobes tentent d'abolir les corrections aux injustices qui nous ont
si longtemps oppressés. Ce recul se produit même dans les "démocraties"
les plus christianisées comme chez ceux qui se prévalent d'autres
sacrosaintes civilités. La situation actuelle nous pousse à poursuivre
la lutte au lieu de baisser les bras.
Nous avons agi dans un esprit démocratique. En tant que victimes du temps passé, exerçons-nous au respect et à l'empathie vis-à-vis de nos adversaires -- ce qu'ils nomment l'amour du prochain
sans l'exercer. Car ils souffrent de leurs propres problèmes internes
et sont incapables d'en guérir. Comme le dictateur russe qui qualifie
ses victimes de nazis. Ils s'imaginent que nos avancées se produisent à leur désavantage. Pauvres chéris ! Leur
aurions-nous interdit le mariage en faveur du nôtre ?
André
Des plus distrayants aux plus sérieux, les médias soutiennent la mise en valeur des droits fondamentaux de personnes si longtemps dépréciées. Ici, c'est un couple gay et biracial de danseurs britanniques qui est honoré dans Strictly Come Dancing..
Ancien culturiste, acteur, puis gouverneur républicain de l'État de Californie durant 7 ans, Arnold
Schwarzenegger (né en Autriche en 1947, deux ans après la fin de la IIe Guerre mondiale) s'est adressé il y a une semaine au peuple russe. Dans son message il critique l'invasion de l'Ukraine et les fausses informations que Moscou diffuse. "Schwarzy" déclare que Poutine ment non seulement à ses concitoyens, mais aussi à ses soldats en ce qui concerne les véritables raisons de la guerre.
Schwarzenegger raconte combien, à l'âge de 14 ans, il admirait Yuri Vlasov, grand champion russe d'haltérophilie dont il avait épinglé la photo au-dessus de son lit. Cela malgré l'objection de son père qui avait combattu dans les rangs de l'armée nazie en Russie et avait été blessé à Leningrad. L'ancien acteur évoque aussi ses bons souvenirs de l'époque où il tournait les extérieurs d'un film à Moscou. Et il fait l'éloge des manifestants russes contre la guerre actuelle qui ont été arrêtés, emprisonnés et battus pour leur courage.
Le splendide message d'Arnold
Schwarzenegger a-t-il atteint ses destinataires ? Les avis diffèrent...
C'est un privilège masculin. Les jeunes gars qui prennent soin de leur
corps et de leur âme deviennent encore plus beaux lorsqu'ils approchent
de la maturité virile et qu'une harmonie intérieure illumine leur
visage. Loin de la beauté figée des statues classiques, ces hommes
attirent l'attention par des détails de leur caractère qui se reflètent
dans le comportement. Ce qu'on qualifierait de défaut chez d'autres les
rend encore plus attrayants. Leurs rides naissantes dégagent un air de
charmante insolence et les éventuelles barbe ou moustache soulignent
leur personnalité; on souhaite s'y frotter.
La géométrie athlétique du corps mâle avec ses ruptures musculaires plus
ou moins saillantes, ses espaces poilus qui dessinent des chemins ou
camouflent les zones qu'on a envie de débroussailler, cette géométrie
est tellement saisissante qu'on ne s'en lasse jamais. La preuve: les innombrables sites gays qu'on visite sans répit ! Le mien -- discret du côté de
l'exhibitionisme phallique et renouvelé seulement une fois par semaine
-- attire néanmoins plus de 75'000 visiteurs par mois.
Le temps de lâcher un fil, ce bref répit, on devrait le mettre à profit pour décompresser plutôt que de consulter le portable. Vous tenez l'organe dans la main gauche et posez la droite sur votre coeur. Vous vous concentrez sur la sensation du flux dans votre pipeau et élargissez paisiblement cette perception à votre bassin, à vos cuisses, ou plus largement encore. Cette présence à votre chair vous ramène à votre nature profonde, rattachant la verge au corps. À un autre moment, cet exercice de communion peut être prolongé en dirigeant votre pensée vers la sensualité. Car votre bite n'est pas qu'un organe voué à la miction, à la lascivité et à l'éventuelle copulation. Elle prend part (peut-être à votre insu) à vos choix amoureux et amicaux, en même temps que le coeur et les tripes.
Ce souvenir remonte à plus de 70 ans. Mon petit frère et moi observions un ouvrier occupé à creuser une tranchée. Alors que l'enfant se grattait l'entrejambe, le gars l'a tancé disant: "Gamin ! si tu continues à frotter ta quéquette, elle tombera !" À l'époque, l'éducation des enfants se faisait à coup d'interdits. Les garçons grandissaient entourés de menaces concernant leur petit zob. La masturbation rendait débile ou aveugle; la religion interdisait les relations sexuelles avant le mariage; et toutes sortes de sujets n'étaient jamais abordés afin de ne pas éveiller la curiosité des enfants. Quant à l'homosexualité, elle était une abomination, ce qui laissait imaginer qu'on était le seul "pédé" au monde. Et voué à l'enfer...
Oui, ce membre qui s'allonge tout à coup comme un animal curieux de
regarder par la fenêtre. Et, pire encore, se met à juter: est-ce une
maladie ? Le robinet qui servait à évacuer l'urine développe peu à peu
une autre vie. Il devient biroute qui déroute son propriétaire en le
mettant mal à l'aise en public.
Dans ma jeunesse, seuls des pères "mal élevés" mettaient leurs fils au
courant de cette progressive évolution sexuelle. Et cela en des termes
"grossiers", ceux que les hommes utilisent couramment aujourd'hui. Le
manque d'accompagnement paternel et de partage des secrets de la
virilité explique -- partiellement -- pourquoi tant d'hommes mènent,
aujourd'hui encore, une vie si maladroite.
Selon la tradition, on peut se passer d'un médecin pour établir un premier diagnostic. Pissez contre l'écorce d'un arbre, mais pas dans l'urinoir ! Si votre urine attire des fourmis, vous souffrez peut-être d'un diabète. Si elle sent la viande, c'est un problème de cholestérol. Si vous avez oublié d'ouvrir la braguette, l'affection neurologique d'alzheimer pointe à l'horizon. Si vous avez pissé à côté, c'est plutôt le parkinson. Si vous avez mouillé vos chaussures, aïe la prostate ! Si vous ne sentez aucune odeur, c'est la preuve que vous avez souffert du covid 19 et non d'une grippe. Et ainsi de suite...
J'aime la ville de Hambourg. J'avais 17 ans la première fois
que je l'ai traversée. Un camarade qui y est né m'a prêté un bouquin intitulé Hamburg auf anderen Wegen
qui passe en revue la
vie des communautés gays depuis la République de Weimar jusqu'au début
des années 2000. Voici, en résumé, "l'affaire des miroirs". Durant des
années une rumeur a couru que la police hambourgeoise avait installé des
miroirs-fenêtres dans les pissotières publiques que beaucoup
d'homosexuels fréquentaient. Un film anti-regards était collé derrière
le miroir couvrant une ouverture dans le mur. Il empêchait les gars de voir ce
qui se passait à l'extérieur, alors que les flics pouvaient observer leurs
ébats depuis une cabine extérieure. Huit miroirs ont été
installés dans des pissoirs de 1964 à 1974. Ils permettaient d'aller arrêter des gars à
coup sûr sans qu'ils se rendent compte qu'on les avait espionnés.
Le scandale a éclaté lorsque des militants ont tenté de casser l'un de
ces miroirs à coups de marteau. La police les a
arrêtés. Les gays ont avisé la presse et cassé un autre miroir en
présence de journalistes. Les quotidiens en ont fait de beaux titres comme
"Le peepshow des flics". L'affaire est allée jusqu'aux instances
politiques et a permis de faire avancer la cause de ceux qui
deviendraient plus tard les LGBTQ.
Le bon vieux temps du covid...
Pourquoi les homosexuels se rencontraient-ils et passaient-ils à
l'action dans des lieux aussi exposés que les pissoirs et les parcs
publiques la nuit ? Parce qu'ils n'avaient pas d'autres enddroits où se réunir. Les parents n'auraient pas accepté la visite d'un petit copain.
Les bars spécialisés étaient rares et leur fréquentation dangereuse. Des
voyous vous cassaient la gueule et vous dévalisaient à la sortie. C'est
pourquoi nous autres militants avons créé des groupes qui se
réunissaient régulièrement en lieu sûr. C'est ainsi que les sorties du placard et la révolution
des gays ont commencé.
André
Ayons une pensée et recueillons-nous un instant en considérant l'épreuve qui s'est abattue sur les soldats des deux camps de la guerre -- des cousins, presque des frères par leurs origines -- ceux qui protègent leur pays et ceux qui ont été envoyés au combat sur des prétextes mensongers. La vidéo de Rammstein, publiée jeudi 10 mars dernier, peut nous entraîner dans une méditation de miséricorde et de compassion.