aux hommes: encore trop rares.
L'étude de la vie des primates proches de nous (génotypes semblables à 98%) a généré une flopée de bouquins. Les chimpanzés, nos cousins belliqueux, éclaireraient les causes de notre mécanisme de domination mâle. Quant aux bonobos, nous devrions imiter leur application des rapports sexuels à la résolution des conflits. Exemple: le patron est d'une humeur de chimpanzé ce matin; pour le pacifier, on délègue la secrétaire avec mission de lui administrer une petite pipe. Et comme les bonobos sont bis dans leur majorité, on peut aussi envoyer le chauffeur-livreur.Les prochains livres prendront exemple sur les singes muriquis. Ils cultivent si bien la philopathie mâle [la formation de liens affectifs, bonding en anglais, voir texte précédent]. Sauf que les mecs muriquis ne se rendent pas tous les matins au boulot; ne s'occupent pas des enfants ni des tâches ménagères... Là où ils ont raison, c'est de ne pas constamment bassiner leurs femelles avec des demandes d'affection et de consolation; elles sont déjà assez chargées avec les enfants et leurs propres soucis. Alors, ils osent demander aux gars de leur groupe de parole: "Prends-moi dans tes bras, j'ai le moral au fond des bottes! Le patron a été infect, les mômes me laissent pas un instant pour récupérer et ma femme me crie après parce que... enfin tu vois."
Vivre des émotions ensemble:
la Tomatina de Buñol.
Le pédé (s'il a un mari qui remplace le groupe de parole) peut espérer une écoute attentive et un petit calin bonobo en prime-cadeau. A moins d'avoir épousé une desperate housewife, une garce désespérante.
Tels seraient les bénéfices d'accepter notre sensibilité naturelle sans dépendre uniquement de ma-man, de ma-femme ou de ma-copine. L'apprentissage de la virilité nous a longtemps privés de l'affection entre mâles. Mais la société évolue à cause, dit-on, de l'indépendance accrue des femmes (pillule et capote, avortement, profession). On oublie un autre facteur de changement, présent en Europe de l'ouest: la fin des guerres. Pour renouveler la chair à canon, il fallait dès l'enfance former des petits soldats, rabattre leur sensibilité, élaguer l'esprit libertaire, faire de l'obéissance une seconde nature, créer des hommes fiers de tuer pour protéger leur famille, mais aussi prêts à mourir pour entretenir la vanité du roi ou du président. Les petits mecs apprenaient à se différencier des femmes, à se battre contre tout le monde, ne pas se plaindre (donc aussi ne pas exprimer ni comprendre leurs propres états d'âme). Aujourd'hui encore, ceux qui n'entrent pas dans le moule macho sont méprisés dès l'école. Et de quoi les traite-t-on? De gonzesses (ce qui en dit long sur l'estime qu'on porte à l'autre moitié de la population -- dont la majorité des mecs dépend néanmoins pour assouvir ses désirs sentimentaux et sexuels, pour assurer sa survie, et s'occuper de sa progéniture). On les traite de gonzesses ou d'enculés (alors que, comme les bonobos, ils sont nombreux à désirer secrètement une vigoureuse stimulation de leur périnée et leur prostate).
Mieux que la Tomatina: oser demander
l'écoute, l'affection et la consolation.
Dommage que les hommes dans leur majorité n'osent pas encore créer ces liens affectifs qu'il quémandent en se soûlant avec les supporters du club de foot et les camarades de volée; en s'exaltant avec les frères de la secte musulmane, chrétienne ou politique; en se lançant des défis stupides. Car pour eux, mieux vaut mourir inconsolé et stupide que de perdre sa virilité... Tel est le repli machiste que nous sommes en train de faire tomber, je l'espère.l'écoute, l'affection et la consolation.
Ulysse
2 commentaires:
C'est vrai, la domination masculine n'apporte plus les mêmes privilèges qu'avant. Elle ne comporte pas non plus les mêmes responsabilités.
Encore faudrait-il savoir, cher Ulysse, ce qu'est un groupe de parole! Les hommes imaginent que communiquer c'est annoncer: "Chuis dans un embouteillage, cha fait scier, chte rappelle dans une heure".
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